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On fait grand cas de l’appartenance à la Royal Society de fondateurs de la fm londonienne !
La Royal Society of London for Improving Natural Knowledge, fondée en 1660, source de la fm moderne selon quelques commentateurs Français, était bien peu savante au XVIII° siècle. A peine 20% de ses membres s’occupaient activement de science et bien peu ont laissé leur nom dans ces domaines (Newton, bien sûr, et Boyle, celui de la loi des gaz parfaits, en étant l’exemple). Quelques autres, dont Stukeley, étaient surtout naturalistes ou archéologues amateurs. C’est bien expliqué sur Wikipédia en anglais, mais pas en français.
« The appointment of fellows was first authorised in the second charter, issued on 22 April 1663, which allowed the president and council to appoint as fellows any individuals they saw fit. This saw the appointment of 94 fellows on 20 May and 4 on 22 June; these 98 are known as the « Original Fellows »… Many early fellows were not scientists or particularly eminent intellectuals; it was clear that the early society could not rely on financial assistance from the king, and scientifically trained fellows were few and far between. It was therefore necessary to secure the favour of wealthy or important individuals for the society’s survival.
While the entrance fee of £4 and the subscription rate of one shilling a week should have produced £600 a year for the society, many fellows paid neither regularly nor on time. Two-thirds of the fellows in 1663 were non-scientists; this rose to 71.6% in 1800 before dropping to 47.4% in 1860 as the financial security of the society became more certain. »
Pendant tout le XVIII° siècle, à peine 30% des membres étaient des hommes de science, les autres étaient des « amateurs » fortunés. (La situation n’était pas différente de celle des loges écossaises du XVII° siècle, avec leurs gentlemen masons ! )
L’intérêt de Newton pour l’alchimie, et l’exégèse biblique (en particulier le temple de Salomon dont l’étude mathématique pourrait, pensait-il, révéler les dimensions de l’univers, mais aussi l’apocalypse de Saint-Jean) est connu depuis toujours. Suffit de taper « Newton and alchimy » sur Google pour le constater. Je donne un petit exemple :
1. Keynes, J.M., ‘Newton, The Man’; Proceedings of the Royal Society Newton Tercentenary Celebrations, 15–19 July 1946; Cambridge University Press (1947)
2. « Newton’s manuscripts provide evidence that he gave considerable thought to alchemy as emblematic of a purely scientific explanation of nature and was in fact deeply involved in conceiving alchemy as spiritual. » F. Calian, « Some Modern Controversies on the Historiography of Alchemy » in Annual of Medieval Studies at CEU (2010), 186.
3. « his alchemy cannot be seen solely in connection with his chemical experiments but was also a link between his religious beliefs and his scientific aims ». Karin Figala, « Newton’s Alchemy, » in The Cambridge Companion to Newton, ed. I. Bernard Cohen and George Edwin Smith (Cambridge: Cambridge University Press, 2004), 375.
L’alchimie est au départ un mélange de technologie égyptienne, de philosophie grecque et de mystique proche-orientale. La métallurgie antique se mêle à une explication théorique du monde physique, basé sur l’existence d’une Materia Prima, substance originelle qui prenant « forme » constituait les quatre éléments, lesquels par diverses combinaisons formaient les objets sensibles. Par l’art métallurgique, cette résultante pouvait être décomposée et la matière première retrouvée. La séparation primitive renvoyait à la conception, initialement astrologique, de la correspondance du microcosme et de du macrocosme, des métaux et des planètes, de l’esprit humain et de l’Empyrée divin. Points clés, l’univers, l’homme, la nature … étaient vivants donc susceptibles de transformations. De même que l’homme mûrissait et se transformait lors de son parcours terrestre, de même les métaux mûrissaient et se transformaient dans le sein de la terre. L’homme, par la mort et la nouvelle naissance qu’elle portait en germe, atteignait la perfection céleste ; de même les métaux dans la terre se transformaient en argent et en or, non par un processus continu mais par étapes successives de mort et de renaissance. Par l’art métallurgique (et la prière), l’homme pouvait accélérer le processus et amener la mort du métal « imparfait » et sa renaissance en une forme achevée (l’or). (Le gouvernement britannique, craignant l’inflation et la dévaluation de la monnaie que pourrait entraîner le succès pratique de l’alchimie annoncé par des charlatans de toute sorte, avait pris des mesures sévères contre son étude, ce qui pourrait partiellement expliquer la discrétion relative de Newton sur le sujet).
Que Newton se soit passionnément intéressé à cette vision du monde n’a rien d’étonnant, en une époque qui est à la frontière de la pensée analogique intuitive et de la méthode expérimentale plutôt déductive et analytique (évolution bien expliquée après M.Foucault dans Les Mots et les Choses, 1965). Après tout, ces propres découvertes, la décomposition de la lumière en ses composantes élémentaires, les lois du mouvement, la gravitation universelle, le calcul différentiel même … pouvaient fort bien entrer dans une vision globale du monde de ce type, appuyée sur une croyance en une divinité impersonnelle et non-trinitaire. Il est inutile de postuler un Newton, savant moderne pour la Royal Society chère (pourquoi ?) aux francs-maçons français et alchimiste passionné d’occultisme en cachette.
Par contre, si on s’accorde à penser que Newton chercha la pierre philosophale et l’élixir de longue-vie, personne ne s‘avance jusqu’à écrire que ses recherches furent couronnées de succès et que la formule magique se trouve enfouie dans ses écrits.
Stukeley, Gotlib et Newton!
Stukeley, qui avait fréquenté Newton fut le premier à raconter, dans la vie de Sir Isaac dont il fut familier l’anecdote de la pomme, qu’il tenait selon ses dires d’une anecdote que le génial physicien lui avait racontée! Pour être exact, il semble que John Conduitt, le mari de sa nièce et franc-maçon, qui succéda à Newton comme maître de la Monnaie, la raconta également. Quant à Gotlib, on sait ce qu’il en fit…
William Stukeley, originaire du Lincolnshire, écrivit dans son journal (24 décembre 1725) :
Pendant que je vivais à Londres, où je séjournai neuf ans d’affilée dans la fleur de mon âge, je profitai de l’intimité de Thomas Lord Pembroke , d’Heneage comte de Winchilsea , de sir Isaac Newton , du Dr Halley , de sir Hans Sloane , de James West , du duc d’Argyll … en bref de tout ce qui comptait dans le monde érudit et vertueux, qui était alors très riche, et ayant accès à leur bibliothèque j’arrivai à un niveau considérable de connaissance et d’égale réputation.
Stukeley connaissait et fréquentait l’élite des Lumière de l’époque post-augustéenne londonienne, celle qui fascina Voltaire durant son séjour (forçé) dans la capitale anglaise.
Passionné d’antiquités (des vieille pierre, dirions-nous), Il eut ainsi accès à de nombreux ouvrages rares dont certains traitaient du temple de Salomon. Il n’eut jamais, semble-t-il, de contact direct avec les loges écossaises.
(- Pembroke, Président de la Royal Society en 1689-1690, homme d’état.
– Henneage, duc de Winchisley, refusa de prêter serment d’allégeance au roi d’Angleterre
– Newton n’était ni maçon ni intéressé par la maçonnerie, quoique on en dise de ci de là.
– Halley, l’homme de la comète
– Sloane, Médecin anglo-irlandais, ses collections furent à l’origine du British Museum
Président de la Royal Society (1768-1772)
-John Campbell, duc d’Argyll, noble écossais, commanda les troupes gouvernementales contre la rébellion jacobite et finit commandant en chef de l’armée britannique.)
A Pierre Noël,
Que pouvez-vous dire à propos de Isaac Newton et son rapport à l’alchimie ?
Il se dit qu’il possédait la bibliothèque la plus complète d’Europe sur le sujet.
Egalement, les archives dispersées par Sotheby’s en 1936 étaient semble-t-il très nombreuses.
Je vous remercie par avance.
Stukeley comme d’autres francs-maçons de son temps était fasciné par le Temple de Salomon.
Il y avait alors plusieurs livres très populaires sur le Temple : l’Orbis Miraculum de Samuel Lee (1659) et le Solomon’s Temple Spiritualized de John Bunyan (1688).
Stukeley possédait un exemplaire de « The Old and New Testament connected » du Dr. Humphrey Prideaux (1648-1724) qui contenait une description élaborée de la structure et de l’ameublement du temple (1).
La correspondance entre Stukeley et le duc de Montagu (dans le milieu des années 1740) montre cette fascination pour la disposition architecturale du Temple. Dans une lettre du 29 janvier 1744, Stukeley indique qu’il travaille assidûment sur un modèle aussi parfait que le permettaient les données de l’époque :
« My Model-maker told me of the errors in the Model, of the Arches of the Temple not being the same breadth but that he would rectify it. I am sure they were right in the plan ».
Faut-il rappeler que le temple de Salomon est un des thèmes favoris de la franc-maçonnerie depuis les Old Charges, les Nouvelles Constitutions (d’Anderson) et le développement de la légende du troisième grade (et de ses suites dans les grades dits-écossais) ?
Il mettait à cet ouvrage la minutie qu’il mettait en tout.
1) Trevor Stewart. The Prestonian Lecture for 2004.
L’intérêt de Stukeley pour le temple de Salomon est un point qu’il avait en commun avec sir Isaac Newton avec qui il parla de ce temple à la Noël 1725 et en avril 1726 (ces deux dates apparaissent dans les écrits de Stukeley). Il faut mentionner aussi le fait que les noms des deux colonnes Bo’az et Yakin du temple de Salomon furent choisis comme mots de passe dans le rite écossais du « Mason word » conçu et élaboré par la loge de Kilwinning un peu avant 1628. Ce rite sera développé en 1696 dans l’Edimbourg qui, conformément à l’art de mémoire qui était traditionnellement composé d’allégories, se réfèrera sous le voile d’allégories non seulement aux deux colonnes, mais aussi aux autres meubles de l’Oulam du temple comme l’autel des holocaustes bâti en pierres brutes (appelé « pierre de parpaing »), la mer de bronze (appelée « large ovale » parce qu’elle était circulaire), et enfin le « pavement de carreaux » (origine de ce qu’on appelle aujourd’hui le pavé mosaïque). Sur l’histoire du Mason word, consulter, analyser et comprendre la documentation réunie par Harry Carr dans « A collection of references to the Mason word », AQC, 1972.
Patrick Négrier
@Jean Vila
J’ai très sommairement répondu à cette question (14, si je ne me trompe).
L’ordre des Druides est toujours bien vivant. Il a un site facebook.
On raconte qu’il fut constitué le 22 septembre 1717, à la Taverne du Pommier (The Apple- Tree Taverne), à Londres, sous l’impulsion de l’irlandais John Toland.
Il existe toujours et a des ramifications (souvent multiples !) en UK, aux USA, en Australie … et même en France.
Bonjour à tous,
Le 13 juillet, je m’étais permis un commentaire (sous le N°13) et dans lequel je faisais allusion à la fondation du Druid Order, à Londres, à l’équinoxe d’automne de 1717 et dans une des mêmes tavernes où se réunissaient des Loges londoniennes.
Stukeley aurait été dirigeant de ce Druid Order de 1722 à 1765 (33 ans, excusez du peu !).
J’en demandais un début de confirmation auprès des très érudits commentateurs de ce site. Pas encore de réponse et je suis un peu étonné qu’un tel engagement druidique ait pu échapper à leur sagacité…
Merci donc de bien vouloir nous apporter un peu d’éclairage sur cette face (cachée ou apocryphe) de ce cher William Stukeley…
LES JUMEAUX DE STUKELEY!
I was made a Freemason at the Salutation Tavern, Tavistock Street, with Mr. Collins and Cpt. Rowe, who made the famous Diving Engine.
Quant à Mr Collins.
Il pourrait s’agir de Richard Collins (date de naissance inconnue – décès 1732), peintre, à ne pas confondre avec Richard Collins, peintre aussi (1755-1831).
Il s’agit d’un peintre élève de Michael DAHL, un des premiers auteurs anglais d’une « pièce de conversation » (comme Hogarth en fit de nombreuses !). On lui devrait deux portraits de W. Stukeley (un en tous cas m’est bien connu). Sa biographie dans l’Oxford Dictionnary of National Biography, une référence en Angleterre, l’affirme franc-maçon, conjointement avec un certain « de la Fountain », peintre également, avec qui il initia de nombreux maçons, non loin de Spalding. Il fut, en 1727, fait membre honoraire de la Spalding Gentleman’s Society, dont Isaac Newton, Stukeley, Desaguliers, Francis Scott-Earl Dalkeith (GM 1723), Henry Hare-Baron Coleraine (GM 1728) furent également membres. (Berman l’affuble dans une note du titre de « Viscount Falkland » mais ce titre jacobite était porté par Lucius Henry Cary, 6th Viscount Falkland, à l’époque, il semble donc que cette note de « The Foundations of Modern Freemasonry » doive faire l’objet d’une vérification p.264, note 95 du chapitre 4) A Londres, il aurait été membre de la Loge Blue Boar sur Fleet Street (toujours selon Berman).
Alternativement il pourrait s’agir du philosophe Anthony COLLINS, mais cette hypothèse me semble moins probable.
Cpt Rowe.
Le Cpt. Rowe nous est plus facile à identifier. Il s’agit de Jacob Rowe, originaire du Devon (réf Peter Earle, Treasure Hunt: Shipwreck, Diving, and the Quest for Treasure in an Age of Heroes).
En tout cas, Rowe est « patenté » en octobre 1720 pour un appareil de mesure en mer garanti par l’Amirauté et Trinity House, ainsi qu’une cloche à plongeur dont Charles Delafaye, maçon et maître espion, diplomate qui fut l’acquisition de son matériel apparemment. Il en écrivit une description dans : A Demonstration of the Diving Engine; its invention and various uses, sans doute vers 1730.
J.T. Desaguliers fait la description de ce matériel de plongée dans le volume 2 de son « A Course of Experimental Philosophy » publié en 1744 (mais il existe peut-être une édition antérieure de cet ouvrage, à chercher).
Espérant vous avoir été d’intérêt
ALEX MISAUBIN
En septembre 1723, W.Stukeley et Roger Gale (1672-1744, autre antiquarian connu, membre de la Society of Antiques et de la Royal Society for Improvement of Knowledge, ami et beau-frère de Stukeley, tous deux proches de Newton) inspectèrent une inscription gravée sur un fragment de marbre découvert en avril de la même année à Chichester, petite ville du Sussex (sud de l’Angleterre) connue pour son passé romain. Ils purent la déchiffrer non sans difficulté. Elle devint par la suite propriété du duc de Richmond (on ne sait ce qu’elle est devenue depuis). Voici leur transcription :
« Neptuno et Minervae templum pro Salute domus divinae, ex auctoritate Tiberii Claudii Cogidubni regis, legati Augusti in Britanniae, collegium fabrorum et qui in eo a sacris (ou sacerdotes) sunt de suo dedicaverunt, donante aream Pudente Pudentini filio »
(La corporation des ouvriers et ses prêtres (dignitaires ?) dédient ce temple à Neptune et Minerve pour le bonheur de la famille impériale (divine), par le pouvoir de Cogidubnus Tibère Claude, roi, légat d’Auguste en Grande-Bretagne, le terrain étant offert par Pudens, fils de Pudens)
(Claude fut empereur de 41 à 53 A.D. C’est sous sa magistrature que fut envahie l’Angleterre. Cogidubnus était sans doute un de ces roitelets soumis à l’autorité romaine qui, en échange, avaient reçu le droit de conserver leur titre et de se présenter comme légat de l’empereur romain, Claude. Selon la coutume fréquente parmi les affranchis, il avait adopté le nom et le surnom de son maître. Le Pudens qui fit don du terrain peut être Aulus Pudens, sénateur romain, époux de Claudia Rufina, fille d’un autre roitelet britannique].
Les corporations d’ouvriers existaient, d’après Plutarque, depuis le (légendaire) roi Numa Pompilius. Elles avaient suivi les légions et se sont répandues dans tout l’empire. Connues sous le nom Collegia Fabrorum, elles sont l’objet de tous les fantasmes (beaucoup y voient l’ancêtre lointain du mouvement qui conduira aux loges maçonniques).
Une fois de plus, on retrouve des antiquarians, des amateurs de vieilles pierres, des membres de la Royal Society, des francs-maçons (Stukeley et Richmond, GM en 1724 ; Gale ne semble pas l’avoir été), les Collegia Fabrorum et la vie intellectuelle de Londres de l’époque « Augustéenne ».
La Grande Loge d’Angleterre naquit dans le petit cercle de la loge du 2ème duc de Richmond (dont le père était déjà franc-maçon) à Westminster qui se réunissait à la taverne Rummer & Grapes, Channel Row, avant de déménager vers 1720 à la taverne The Horn, New Palace Yard (toutes deux à côté de Whitehall, près de la Tamise) . Les membres en étaient des aristocrates, des politiciens et d’autres personnes en vue, Charles Delafaye (un huguenot, sous-secrétaire d’état), William Cowper (haut magistrat, Clerk au Parlement ), Jean Désaguliers (FRS, conférencier et chapelain du duc de Chandos), George Payne (civil servant), Martin Folkes (FRS), Alexander Chocke, Nathaniel Blackberry, Leonard Streate (tous trois hauts magistrats nommés par le Lord Chancelier), John Beal (médecin, il devint député GM). Ils purent convaincre le duc de Montagu, ami de Richmond, de devenir Grand Maître en 1721. Montagu était un des hommes les plus riches du royaume. Beau-fils de Marlborough (celui de la chanson !) , il était proche des huguenots Français et occupa des fonctions éminentes à la cour. Son élection fit de la maçonnerie un lieu à la mode, un club huppé attirant de nombreux membres et l’attention du public et de la presse. C’est de son accession à la Grande Maîtrise que date l’augmentation fulgurante du nombre de loges.
Les Lords Chancellors qui se succédèrent de 1714 à 1733 n’eurent de cesse qu’ils aient écarté les Torys et les jacobites de toutes fonctions judiciaires importantes. En plus d’être le rempart de l’Establishment contre le London mob (la populace), Ils avaient tous des attaches familiales étroites avec la franc-maçonnerie par frères, fils ou beau-fils interposés.
La maçonnerie devint ainsi, dans ces loges élitistes (il y en avait beaucoup d’autres, populaires et ouvertes aux classes moyennes dans les quartiers moins « snobs », Soho, Holborn, Clerkenwell, Southwark …) un lieu où se retrouvaient des nobles, des gentlemen, des érudits de toute profession et dénomination, un endroit de rencontre acceptable à tous niveaux et marqué par la tolérance religieuse et l’exigence morale. Quoique pro-gouvernemental, le mouvement restait tolérant et ouvert (sauf aux femmes, aux esclaves, aux mineurs d’âge et aux hommes immoraux ou scandaleux !).
Stukeley fut un des premiers maçon de cette époque à avoir la triple affiliation (Franc-maçon en 1720, FRS Royal Society, 1718, et la Société des Antiquarians (Folkes, Montagu et Richmond en furent aussi membres, ainsi que James Anderson), qu’il avait remise sur pied en 1717). Il fut aussi membre de la Spalding Gentleman’s Society (dont Desaguliers et Folkes étaient aussi membres). Il sortait de Cambridge, ce qui pourrait dans une certaine mesure le rattacher (comme peut-être Newton lui-même) au courant des platoniciens de Cambridge qui se développa vers le milieu du XVIIème siècle, et qui prônait l’alliance de la foi et de la raison et une attitude latitudinaire sur le plan religieux (comme les whigs qu’ils étaient pour la plupart).
Tous les noms cités (sauf Anderson!) étaient membres de la Royal Society, comme de nombreux maçons de la Horn Tavern et de Bedford’s Head Covent Garden.
A noter qu’en 1723 (date à laquelle selon Daruty, The Rummer & Grapes qui était sur Channel Row (où habitaient Desaguliers et Richmond et où quelques années plus tard Montagu fit construire), se déplaça vers The Horn qui se trouvait à quelques dizaines de mètres, sur New Palace’s Yard ou St Margaret’s Street. ce fut donc en effet l’une des loges les plus actives pendant les 10 ou 15 premières années de la franc-maçonnerie moderne (mais il y en eut d’autres comme Bear and Harrow, Bedford’s Head ou The Rummer at Covent Garden)
En fait ces maçons aux affiliations multiples comme Folkes, Stukeley, Jones, Montagu, Richmond, Brook Taylor, William Jones, ou Charles De La Faye, et bien d’autres, semblent avoir été les premières forces vives du mouvement!
Le Druid Order existe avec des hauts et des bas (dont des scissions, comme toute association humaine !) depuis le XVIII° siècle.
John Toland, William Stukeley, John Aubrey sont régulièrement cités parmi ses membres.
Réorganisé en 1909, l’Ordre organise des fêtes hautes en couleur, toujours bien suivies. Il a un site facebook, où son centre d’intérêt et ses activités sont décrites.
L’association de tout ce qui est maçonnique ou para-maçonnique (au XVIII° siècle) est la tarte à la crème d’une partie non-négligeable de la maçonnerie française actuelle.
S’i’ous plait mes TCFF, ‘y aurait-i’ pas autre chose à dire à propos de ce cher William Stukeley ?
Dans les années 80, je lisais une thèse de doctorat de 3eme cycle, soutenue à Rennes, d’un dénommé Michel Raoult et consacrée aux sociétés druidiques… Mais était-ce bien sérieux ?
Stukeley se voyait présenté comme Antiquarian par sa passion pour l’archéologie, en particulier ses tentatives de déchiffrage du site de Stonehenge. De là à approcher les cercles druidiques et y adhérer il n’y avait pas loin. C’est ce que l’auteur de la thèse développait, tout en précisant qu’une fédération dite Druid Order vit le jour à Londres, au solstice d’automne de 1717 et dans une des tavernes accueillant aussi une des quatre Loges maçonniques ayant participé à la fondation de la GLL.
Il se fait que je viens de retrouver le document intégral sur le site : Michel Raoult http://www.sceptiques.qc.ca/dictionnaire/userfiles/file/les-druides-michel-raoult
et que le chapitre concerné peut se lire à partir de la p.63, Stukeley étant directement cité p.68. Il aurait été le chef-druide de l’organisation de 1722 à 1765…
Après cette ancienne lecture, j’avais toujours été étonné que la FM ne fasse jamais allusion à aussi curieuse coïncidence et à la double appartenance de certains frères-druides. Le tout, dans le cas de Stukeley, sous l’égide de la Royal Society…
Pourrait-on ressentir en cela une tentative de fusion entre la « spéculation » maçonnique et une sensibilité
« vibratoire » ancrée dans la nature… ? De l’ordre d’une chaîne d’union très consensuelle et donc un peu « chargée »… ?
Merci d’un début de commentaires de la part de nos très prolixes et érudits correspondants.
Ce qu’écrit Stukeley est particulièrement intéressant à cause de la date et de l’endroit où il écrit. Déjà, très tôt finalement (1736), on a, dit de manière tout à fait frappante, et à la source de la maçonnerie (Londres!) ce que décrit Jan Assman dans son livre « Religio Duplex », (Aubier 2013), c’est à dire le désir et la construction, (mais d’après Assman sensiblement plus tard et en Allemagne surtout) de la maçonnerie comme le lieu d’une approche « d’autre chose » qui ne s’appelle pas encore ésotérisme, mais qui veut porter un nouveau regard sur la religion vue à la fois dans son acception social et son acception spirituelle. Merci pour cet échange.
Ce qu’on ne dit pas, c’est que Stukeley ne parla plus jamais de maçonnerie après 1730. Elle ne l’intéressait manifestement plus, qu’il y ait trouvé ou non ce qu’il croyait y trouver pendant les dix années qu’il en fut membre.
Il était pourtant resté en contact avec nombre de maçons, et non des moindres. Une note dans son journal de juillet 1749 le décrit assistant aux funérailles du duc de Montagu, l’ancien GM de 1721, aux côtés de leur ami de la Royal Society, Martin Folkes , deputy GM de 1724 à 1725 pendant la grande maîtrise du duc de Richmond . Elle ne contient aucune allusion à leur ancienne appartenance.
« 18 July, 1749. Mr. Martin Folkes and I walked by 5 a clock in the morning to the Castle, Kentish-town , to pay our last respects to the illustrious remains of the Duke of Montagu. 59 minute guns at the tower went off during his passage through the city. Soon after 6 the herse (sans doute hearse, corbillard) came by, on which I threw some honey-suckle flowers (fleurs de chèvrefeuille) I had got out of the hedges (haies).
Manibus date lilia plenis ;
Purpureos spargam flores, animamque nitentem [nepotis]
His saltern accumulem donis. et fungar inani
Munere (1). [ Virg. En. vi., 883.] »
Vous le voyez, le problème de la rétention des membres ne date pas d’hier ! Je crains que notre exemple ne soit pas la solution.
1) À pleines mains, offrez des lys ! Ah, que je répande des fleurs pourprées, qu’au moins sur l’âme de mon petit-fils, j’accumule des offrandes, et m’acquitte ainsi d’un vain devoir.
Mon BAF, tu es cité par Thierry Zarcone dans l’article « L’héritage hermétiste et néo-platonicien » de l’excellent ouvrage « trois cents ans de franc-maçonnerie » publié par la GLNF aux éditions Dervy
En 1736, Stukeley écrivit ces lignes qui montrent ce qu’il cherchait en maçonnerie, une révélation qu’il n’avait pas trouvée dans la religion de son temps (donnant une curieuse image de la prêtrise qui annonce le Vicaire Savoyard et fait peu de cas du christianisme).
« On voudra savoir quel était le but et la cause de leur initiation à ces mystères. La réponse sera qu’ils y apprenaient le silence, l’art de garder un secret, chose bien utile dans la vie politique ; ils apprenaient à cultiver une amitié inviolable, la moralité &, à la longue, une notion plus exaltée de la religion que le reste de monde n’en connait… Par là, l’amitié scellée parmi les initiés en prenait un caractère sacré & inviolable : ils étaient frères à jamais.
Ceux qui étaient initiés aux mystères étaient, croit-on, liés par un vœu, par un lien sacramentel, de suivre à l’avenir un parcours très vertueux, à la fois en paroles et en actes, en accord avec cette exacte connaissance de la religion qu’ils y avaient apprise … en sorte que les mystères avaient pour but de donner une notion meilleure de la divinité et d’une religion meilleure que celle qui était professée publiquement. C’était un acte religieux d’une plus haute espèce que celui habituel, & accompagné, pensaient-ils, d’une influence divine, d’espérances et de récompenses meilleures. Toutes ces considérations démontrent qu’elle (la religion ordinaire) n’est que corruption de quelque institution patriarcale & qu’elle est bâtie sur les fondations de quelques parties de la religion première et authentique, que l’histoire ne nous a pas particulièrement transmise… »
Si la religion ordinaire telle qu’elle est enseignée par les prêtres « n’est que corruption de quelque institution patriarcale & qu’elle est bâtie sur les fondations de quelques parties de la religion première et authentique, que l’histoire ne nous a pas particulièrement transmise », c’est de facto au sens où les prêtres ne possèdent et ne transmettent qu’une perception exotérique de l’Ecriture dont l’ésotérisme constitue l’essence non corrompue et première, ésotérisme qu’il n’est possible d’atteindre que par l’exégèse symbolique de la Bible, laquelle nécessite de remplir plusieurs conditions :
1. exégèse basée non sur des traductions mais sur les textes originaux et qui implique de connaître suffisamment l’hébreu et le grec ;
2. approche scientifique de l’Ecriture, compte tenu des acquis basiques de la médecine, de la physique, de la chimie, et de l’astronomie (ne sous-estimons pas à cet égard les Anciens) ;
3. approche philosophique, rationnelle, de l’Ecriture ;
4. pratique de la typologie biblique ;
5. recours à l’histoire de la culture par la connaissance et la compréhension des sources égyptiennes et mésopotamiennes voire grecques de l’Ecriture ;
6. connaissance et pratique de la science traditionnelle des symboles ;
7. et enfin exercice du « voir » (I Sam. 9,9), dénomination ancienne de ce que les modernes appellent aujourd’hui « méthode phénoménologique » (Kant et Husserl n’ont rien inventé, ils n’ont fait que redécouvrir).
La franc-maçonnerie contient dans sa symbolique (référence au temple de Salomon) et dans sa pratique rituélique divers éléments susceptibles de composer ensemble une méthode épistémologique et herméneutique capable de permettre, à ceux qui le veulent et qui en ont la vocation, de reconquérir les divers moyens culturels qui conditionnent l’exégèse symbolique de la Bible et par là le recouvrement de la « religion première et authentique » qui n’était en réalité qu’une philosophie.
Je pense qu’une chose échappe à l’esprit de beaucoup de maçons : les trois religions monothéistes condamnent fermement l’initiation qui est une pratique des sociétés antiques, notamment égyptienne et grecque.
Ce me semble très précisément ce que Stukeley exprime.
S’arcbouter sur la Bible, en faire autre chose qu’un symbole, me semble un non-sens initiatique.
Se souvenir ce qu’en disent les Basic Principles de 1929, qui n’évoquent aucunement, ni Dieu -notion exclusivement religieuse-, ni Bible ; ils ne parlent que de GADLU -dont la volonté révélée attribuée à une notion religieuse est un abus non seulement manifeste mais un postulat d’une pauvreté déconcertante et qui ne mène à rien d’autre qu’aux principes de la religion, d’où dans ce cas l’inutilité de pratiquer autre chose- et de VLS dont il est expressément précisé : » de manière à SYMBOLISER la révélation d’en haut ».
Se souvenir également qu’en 1929 la GLUA a face à elle un GODF qui essaime dans toute l’Europe et une GLDF qui produit une érudition qui lui est très largement supérieure.
Pour préserver l’autorité sur la maçonnerie, la GLUA se devait d’être particulièrement juste dans ce qu’elle exigeait.
On lit dans le recuel d’écrits autobiographiques de Stukeley : « 4 octobre 1723 : J’ai lu mon exposé sur l’amphithéatre de Dorchester en loge et en ai distribué une copie à chacun des frères ». C’est là un des premiers témoignages historiques sur la pratique de la lecture d’une « planche » en loge. Pierre Mereaux présente de manière détaillée sur une vingtaine de pages la biographie maçonnique de Stukeley dans son ouvrage sur Les Constitutions d’Anderson (Le Rocher, 1995).
Qui confirme qui ? Stukeley en 1721 ou Gould en 1885 ?
Gould confirme Stukeley
Papers of William Stukeley – Bodleian Libraries
http://www.bodley.ox.ac.uk/dept/scwmss/wmss/…/stukeley/stukeley.html
William Stukeley (1687-1765) was an Anglican clergyman, physician, antiquary … Papers of William Stukeley, including diaries, correspondence, and notes on …
Full text of « The family memoirs of the Rev. William Stukeley, M.D., and …
https://archive.org/stream/familymemoirsofr03stuk/familymemoirsofr03stuk_djvu.txt
William Stukeley, M.D., and the antiquarian and other correspondence of William ….. LETTERS AND EXTRACTS FROM DIARIES OF WILLIAM STUKELEY, …
Ce que dit Stukeley de la rareté des francs-maçons à Londres et notamment dans sa propre loge Salutation tavern en 1721 ne fait que confirmer ce que Gould a dit : à part la Horn tavern où déménagea la loge n° 4 qui se réunissait avant au Gobelet et les Raisins et qui comptait en 1725 soixante et onze membres, les trois autres loges fondatrices n° 1, 2 et 3 (numérotation qui apparaît dans les Constitutions de 1738) ne comptaient chacune qu’une quinzaine de membres (Robert Freke GOULD, The Four old lodges, London, 1879).
A quelle adresse internet peut-on consulter le Journal de Stukeley ?