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L’expression « Rite de … » est-elle justifiée quand on parle des usages des tailleurs de pierre, des maçons libres, maçons de franche pierre, de pierre brute, de tuile et de brique … en les opposant à ceux des maçons « acceptés » ou « adoptés » du XVII° et du XVIII° siècle en Angleterre ou en Ecosse ? L’expression consacrée (rite de …) a pris en France, depuis la fin du XVIII° siècle et bien plus lors des 2 siècles suivants, une signification conflictuelle inédite dans ce qui est société de pensée et non société de pratique, « Ecossais » contre « Français », Cadet contre Puteaux … jusqu’à devenir le symbole du heurt entre « spiritualistes » et « sociétaux », celui des « vrais » maçons contre les autres. Transposer ce conflit très local dans les îles britanniques du temps a-t-il vraiment du sens ? Ou est-ce abus de langage ?
La plupart des Anciens devoirs des maçons opératifs contiennent la description du rite qui est généralement la même et qui est celle-ci : « Tunc Vnus ex Senioribus tenent libru & ille vel illi apposuerut manus sub libru et tunc precepta deberent legi &c ». Cette phrase décrit la cérémonie codifiée qui était usitée pour recevoir un nouveau maçon en loge. Dans la mesure où cette cérémonie de réception en loge est codifiée (lecture du livre des Devoirs accompagnée du serment, par le récipiendaire, de respecter les devoirs professionnels et moraux qu’on vient de lui lire), il est logique et naturel de parler de « Rite des Anciens devoirs » même si le mot rite n’apparaît pas dans les A.D.
Raisonnement analogue à faire pour le Mot de maçon.
La coexistence de ces deux rites au cours de l’histoire n’est pas une « opposition » à l’exception du fait qu’en 1722, lorsque les maçons opératifs de Londres qui pratiquaient encore les A.D. apprirent l’existence de la pratique d’un autre rite (celui du Mot de maçon) à la Grande loge de Londres, ils réagirent en publiant les Constitutions Roberts (version d’A.D.) pour protester.
Le fait qu’à partir des années 1750 furent créés de nouveaux rites au reste composés d’emprunts aux deux précédents n’enlève rien au fait que les A.D. et le Mot de maçon se présentaient phénoménologiquement comme des rites. J’ignore s’il y a des conflits entre les rites. C’est aux historiens de répondre sur ce point. Quoi qu’il en soit l’existence éventuelle de rivalités entre les rites est extérieure au fait que les A.D. et le Mot de maçon constituaient des rites de réception en loge.
En effet, l’expression « rite de » n’existe pas dans la littérature maçonnique au 17e siècle ni dans la seconde moitié du 18e (voire les 3/4). D’où les abus de langage qui consistent à conceptualiser un objet (signifiant) par le principe éminemment contestable de la rétrodiction. L’objet ainsi reconstruit n’est que la projection d’une figure théorique imaginée après coup, avec tentation de croire qu’elle était dans l’impensé ou l’inconscient des hommes d’autrefois.
Dans la longue période ici évoquée, en est de même des termes initiations/initier/initié. Dans les îles Britanniques, on n’initie pas, on « fait ». Ce n’est pas du tout la même chose, car les connotations sont alors différentes.
Je m’interroge d’ailleurs sur l’époque où la notion de rituel remplace dans les discours celui de catéchisme. Je n’ai pas approfondi cette question. Mais cela vaudrait le coup d’engager une recherche.
J’ajoute que présenter le « rite du Mot de Maçon » comme un système/dispositif visant à remplacer le « rite des Anciens Devoirs » est inconséquent, puisque nous ne possédons aucune preuve que les AD soient connus en Ecosse avant 1650.
Il convient par ailleurs de se demander à quelle catégorie de maçons s’appliquaient ces AD. Là encore, les abus de langage sont fréquents, puisqu’il existe au Moyen Âge 4 grands types de chantier de construction et les AD ne s’appliquent qu’à un seul. On généralise alors qu’on devrait particulariser.
Par un hasard bizarre, les échanges, qui devaient s’établir autour des théories de André Kervella à propos des sources du REAA, se sont transformés en attaque en règle de celles de Patrick Négrier à propos du Mot de maçon
! ? ! ??
S’agissant du sujet de cet article, la théorie de A. Kervella concernant les sources, secrètes ou pas, du REAA est :
– Jacques Stuart, dit Jacques II d’Angleterre et d’Irlande et VII d’Ecosse, s’étant fait ravir le trône par la Glorieuse Révolution de William et Mary, son fils dit Jacques III, en exil dans toute l’Europe, forma le projet d’une reconquête.
Pour se faire, Jacques III voulu former, ou reformer, une Chevalerie.
Il use pour cela des loges maçonniques Jacobites présentent en France et construit un Ordre de Chevalerie par l’élaboration tout d’abord d’un 4ème grade, puis un système complet de 25 hauts grades maçonniques qui serait la genèse du REAA.
Voilà la théorie de A. Kervella résumée à très grands traits, mais il me semble que l’essentiel y est, l’auteur corrigera ou complètera de ce qui est incontournable pour qu’il n’y ait pas de méprise.
Si vous en convenez, mes Frères, ouvrons la discussion.
Pour ce qui me concerne, il y a une cohérence avec les grades de v:., mais pour le 18è et suivants, et même dirais-je à partir du 12è je ne vois plus trop le rapport.
Je n’ai écrit nulle part que Jacques III a projeté la création d’un système de 25 grades. Ses plus proches fidèles se sont bornés au départ au 4e (Voûte Sacrée/Arche Royale/Royal Arch, selon une appellation de l’après coup). Les grades ajoutés ensuite l’ont été selon des processus complexes que je décris dans mon livre et qu’il est impossible de résumer ici, en raison de l’espace assigné à un blog.
La particularité du 4e grade, qui est assurément chevaleresque, est qu’il est impossible aux hanovriens de se l’approprier, car son contenu renvoie (par le jeu des métaphores, allégories, symboles) aux infortunes des Stuart (errance, exil, restauration). On ne peut même pas m’objecter que leurs allégories ne concernent pas les affaires politiques, car les agents de Jacques III ne cessent, dans les lettres qu’ils échangent entre eux, de dire ouvertement qu’ils emploient le procédé pour renvoyer à leurs préoccupations très concrètes de la reconquête du pouvoir.
Ces lettres étaient parfois interceptées par le service secret hanovrien.
Celui qui était chargé de les analyser était le huguenot Charles Delafaye (famille de souche française), auteur du Chant du Compagnon dans les Constitutions d’Anderson. C’est lui qui, en 1722, coordonne le service de renseignements chargé d’éventer le complot ourdi par Jacques III (complot Atterbury), avec arrestation et condamnation des chefs impliqués. Ce complot visait (croit-on) à assassiner George de Hanovre et (c’est sûr) à mener une opération militaire.
L’apparition du 4e grade est soit contemporain des préparatifs de ce complot, soit rapidement consécutif. Voir la création de l’Ordre de la Restauration (Restoration Order) en mai 1722 pour lequel le duc de Mar reçoit une patente de substitut grand maître afin de l’instituer officiellement après la prise d’Edimbourg, et pas avant. Je rappelle que Mar est possesseur du Mot de Maçon en 1714 (il était comte à l’époque), et c’est le même qui dirige l’entreprise avortée de 1715.
L’apparition d’une échelle relativement stabilisée en 25 grades de l’Ecossisme (le mot apparaît vers 1750) n’est pas le fait de Jacques III. En effet, ce monarque demande à ses partisans de se retirer des loges maçonniques en 1738, au moment où le pape publie sa Bulle de prohibition). Ce retrait ne signifie pas que tous les jacobites y consentent. Ceux de confession protestante, notamment, ont non seulement des scrupules, mais soutiennent dès cette date une position consistant à vouloir l’abdication de Jacques III au profit de son fils Charles-Edouard.
Réponse au post 69
Quand bien même accueillerait-on favorablement l’hypothèse d’une tentative de Schaw pour injecter dans les loges un souffle spiritualiste ou mystique, il est impossible de savoir s’il obtient le moindre effet. Aucun témoignage ne permet de le dire. Le vide documentaire est sidéral. Plus encore, en 1601, Schaw valide une charte au profit de William Sinclair, dans laquelle revient la sempiternelle question des litiges et autres difficultés à régler dans le style judiciaire.
La tradition orale est connue, qui rapporte en effet que les seigneurs Sinclair de Roslin ont été pendant des siècles juges et protecteurs du métier en Ecosse, qu’ils en sont néanmoins venus à négliger cet office, et qu’il serait bon de permettre à leur héritier William de le tenir de nouveau, en conséquence de quoi les maçons du métier retrouveront confiance en eux, et seront mieux considérés dans la société.
Les contractants au moment où cette charte de 1601 est établie regrettent alors leur pauvreté et la lenteur des tribunaux (powertie and langsumness) qui les mettent dans l’impossibilité de soutenir des procès coûteux auprès de la justice ordinaire. Et, faut-il le répéter sans cesse, c’est encore un notaire (spéculatif ????) qui non seulement rédige le texte, mais aide la plupart des présents à signer, disant ne le savoir faire eux-mêmes.
Tradition orale, dis-je, tradition dont le seul véhicule est la mémoire.
Il est piquant de constater que le temps écoulé est très court entre les règlements établis par Schaw et la reconnaissance des droits des Sinclair. Mettant les torts de l’oubli des deux côtés, les signataires par procuration déplorent avoir été négligents et regrettent que les derniers Sinclair de la lignée n’aient pas cherché à les stimuler, au point de s’être désintéressés d’eux.
L’heure serait donc venue de se rappeler l’époque où chacun savait jouer son rôle. N’est-ce pas une façon très orthodoxe, de resserrer un lien distendu avec un lointain passé, car la mémoire a failli, car elle est oublieuse ?
A mon avis, il est tendancieux d’interpréter la fugitive mention sur l’Art de la mémoire dans les Statuts Schaw pour renvoyer à une hypothétique culture mystique, et pour lui attribuer une impulsion déterminante vers la spéculation des modernes.
C’est pourquoi je dis que se devine dans une telle position théorique l’influence de Frances Amelia Yates dont le puissant ouvrage sur cet Art insiste beaucoup sur les écrits des grands auteurs de l’Antiquité gréco-latine, du Moyen Âge européen et de la Renaissance, mais qui laisse aux marges d’autres sources qui préconisent quant à elles les méthodes les plus pragmatiques qui soient. Ne contestons pas les conclusions de Yates sur la littérature ; regrettons seulement que ses lecteurs les glissent trop vite vers les méthodes employées sur les chantiers par les maçons d’autrefois, lesquels – faut-il insister là-dessus ? – ne lisaient ni n’écrivaient pas. C’est le cas de Stevenson.
Chez Schaw et chez les rédacteurs de la charte Sinclair, les soucis matériels et organisationnels l’emportent sur tout autre. Cela est si vrai qu’en 1628 une seconde charte est élaborée au profit d’un autre William Sinclair, fils du précédent, et l’on y retrouve les mêmes plaintes qu’en 1601 sur le dépérissement du métier, la pauvreté des artisans, la lenteur des tribunaux, l’urgence (!) de rétablir une juridiction spécifique, et… la perte de mémoire.
Cette fois une allusion est faite à un vieux parchemin qui aurait été remis au premier bénéficiaire des prérogatives de juge sur le métier, mais c’est pour dire qu’il a été brûlé dans un incendie du château de Roslin, ce dont la mémoire collective se souvient aussi, mais sans plus. Et les délégués de loges qui ne savent toujours pas écrire ni signer, doivent recourir encore à des notaires pour leur tenir la main (spéculatif ???).
Au moment où Jacques VI se voit attribuer la couronne d’Angleterre, aucun écho de l’action de Schaw ne se perçoit dans ce second pays. La situation n’est-elle pas idéale pour y étendre le champ de la réforme structurelle et de son supposé moteur occulte ? Rien n’advient. On objectera que Schaw n’est plus de ce monde et que son entreprise ne peut plus être prolongée, car il vient de mourir le 18 avril 1602, sans être imité par son remplaçant David Cunningham of Robertland. Une telle objection manque de pertinence.
Elle minore en définitive l’influence personnelle de Schaw, et on ne comprend pas alors pourquoi il est dépeint en fondateur inconscient (« il ne savait pas ») d’un système avorté. S’il suffit à un fonctionnaire d’Etat de disparaître pour que son action s’éteigne en même temps, alors elle n’est pas aussi importante qu’on l’insinue.
Post 67 et 70.
Au bout du compte, nous comprenons que Patrick Négrier défend une thèse sur l’origine calviniste du Mot de Maçon. C’est son droit, bien entendu. Je ne suis pas d’accord, parce que la pierre de touche de l’historien est et sera toujours la chronologie. Pour déterminer s’il y a relation d’influence d’un auteur à un autre, d’une institution à une autre, il faut des antériorités démontrées, seraient-elles dans un écart étroit. Comme tous mes confrères, je n’adhère pas à des causalités rétroactives, à des exégèses qui expliquent un phénomène culturel par d’autres survenus longtemps après. On aura beau me citer des documents de la fin du 17e siècle ou du 18e pour tenter de légitimer une interprétation sur d’autres produits au début du 17e, je ne pourrai pas approuver.
En outre, le rapport entre l’Art de la mémoire et le Mot de Maçon, ce n’est pas moi qui l’établit, mais Négrier lui-même. Compte tenu de la focalisation sur le calvinisme, ce rapport porte donc à faux. En outre, affirmer que Schaw n’a aucune idée du type d’art de mémoire que pratique la loge de Kilwinning est extrêmement curieux. Comment défendre une telle opinion ? Comment savoir quelles sont à l’époque les idées de Schaw, ce qu’il pense, ce qu’il ne pense pas ? Faut-il comprendre que Schaw, finalement, ne sait pas ce qu’il fait ? Tenons-nous en aux documents, sans les solliciter abusivement, ni les surinterpréter.
Je pense qu’il ne faut pas non plus exagérer en disant que les membres de la GL de Londres ne soupçonnent pas l’origine du Mot. En raison de tous les pamphlets publiés à l’époque où cette GL prend son essor, ils ont de quoi se faire une opinion. Quand des observateurs extérieurs comme le libraire Samuel Briscoe ou le facétieux pasteur John Henley sont capables d’en remontrer aux lecteurs de leurs pamphlets, dira-t-on qu’ils sont plus instruits que les initiés qui fréquentent les loges et la GL ? Henley deviendra franc-maçon après avoir répandu ses bouffonneries sur la tête d’un peu tout le monde, à la grande désolation de l’évêque de Londres qui voudra lui clore le bec, sans y parvenir. J’ai tendance à penser que, si personne ne soupçonne l’origine « calviniste » du Mot au 18e siècle, c’est tout simplement parce que ce marquage ne tient pas.
Ce que je vais dire n’a rien à voir avec les exégèses savantes qui précèdent, mais expérience.
Lorsqu’il s’agit de répéter (de mémoire) l’explication du tableau du grade, au 1er, 2ème ou 3ème degré d’un rituel anglais ou écossais, le support visuel d’un paysage, de l’intérieur d’un bâtiment ou d’un décor funéraire aide l’effort de mémoire et soutient pas à pas l’exposé du récitant.
Il n’y a là ni occultisme ni hermétisme, mais simple mnémotechnique.
Merci Pierre Noël.
Exact.
66 commentaires et ce n’est sans doute pas fini, mais pour une fois, sur le fond comme sur la forme, un vrai débat nous est proposé.Le monde des blogs serait-il devenu adulte ?
La démarche historique critique est parfaitement illustrée par l’ami Kervella, qui admet lui même qu’on le critique. En gros, tout va bien.
Merci Geplu de proposer cet espace, j’ai suffisamment râlé contre les batailles de cours d’école pour ne pas noter ce bienheureux changement d’attitude de certains.
Réponse au Post 64.
D’une simple évocation de l’Art de la mémoire, on ne peut conclure que Schaw fait allusion à un seul genre relatif aux concepts plaqués sur une architecture, surtout pour un exercice mental ou oral qui ne serait pas orienté vers une pratique. J’ai du mal à accepter ce jeu d’abstractions. Pour des hommes de chantier, le concret domine. J’ajoute que plusieurs n’ont pas d’instruction scolaire (selon les usages sociaux du temps), et c’est pour cette raison qu’ils se font accompagner par des notaires qui signent à leur place (spéculatifs ?????). La mémoire individuelle défaille et les écrits restent (verba volent, scripta manent).
Je voudrais aussi qu’on m’explique en quoi l’Art de mémoire est requis pour apprendre un catéchisme par cœur et/où pour évoluer dans l’espace restreint d’une loge. Les acteurs du temps de Shakespeare en étaient-ils des adeptes ?
1696 ou 1727 : ces deux dates nous éloignent beaucoup de 1599. Encore de la rétrodiction qui ne se justifie pas en bonne méthode historiographique. Dans le texte de Swift cité, ne sont présents en aucune façon ni le Mot de Maçon ni l’Art de la Mémoire. Dire qu’il y a des allusions n’est pas suffisant pour tirer le texte vers une thèse fragile. Une allusion, une transparence : il en faut plus pour étayer une démonstration, surtout quand les lecteurs ne perçoivent pas l’allusion ou lui prêtent un autre sens. Chez Swift on rencontre les expressions suivante : Great Word, Mock Word, Hush Word. Et mieux vaut ne pas oublier (oisive mémoire) que son texte est aussi parodique que sa fable du Tripos.
Je constate aussi que plusieurs de mes questions n’obtiennent pas de réponse. Deux d’entre elles me paraissent incontournables.
1°) Quels sont les Anciens Devoirs connus en Ecosse supposés avoir été remplacés par le Mot de Maçon. On ne peut pas évoquer des AD utilisés après 1628-1637 (je pense ici à la loge d’Aberdeen où une transcription est datée de 1670, et cette date est d’ailleurs contestable) pour expliquer qu’ils ont servi de substrat à un rite présumé forgé au cours de cette période. Nous avons ici une torsion de la chronologie qui laisse extrêmement perplexe.
2°) Quelles relations entre le catholique Schaw et le presbytérien Adamson ? Quelles relations entre ces deux-là et le comte de Mar favorable à l’église épiscopale ? La disparité des attaches religieuses serait-elle une énigme ?
Ce n’est pas entre le catholique Schaw et le presbytérien Adamson qu’il y a un rapport. C’est entre Adamson et la loge de Kilwinning à laquelle Schaw ordonne de pratiquer un art de mémoire, loge qui était (comme Adamson) de confession calviniste presbytérienne depuis au moins 1592, date du passage définitif de Kilwinning à la Réforme de John Knox. Si le Mot de maçon me paraît être à l’origine un produit du calvinisme presbytérien, ce lien confessionnel s’estompa cependant au fil du temps (exemple : le Dumfries n° 4 de 1710 pratique un rituel mixte qui comprend à la fois une version d’A.D. anglican et une version du Mot de maçon tout en esquissant à la fin du texte ce qui sera plus tard la représentation plastique du tableau de loge, pratique plastique interdite dans le serment de l’Edimbourg de 1696, exemple même de texte calviniste) et notamment au cours de l’immigration du Mot en Angleterre où il s’anglicanisa (exemple : mention de l’orientation cardinale des églises dans le Sloane de 1700 alors que les calvinistes abhorraient cette donnée de la liturgie catholique). Créé d’abord par les calvinistes de Kilwinning, le Mot de maçon finit cependant par être diffusé hors de la sphère calviniste. C’est ainsi que vers 1690 le Mot de maçon fut communiqué aux seigneurs de Roslyn qui n’étaient pas presbytériens mais « catholiques ». C’est dans le sillage de ce proto-exemple qu’on peut situer la communication du Mot de maçon au jacobite comte de Mar en 1714, exactement comme, à mon avis, le Mot de maçon sera communiqué aux futurs membres de la GL de Londres dont la majorité d’entre eux étaient anglicans et ne soupçonnèrent apparemment jamais l’origine calviniste de ce Mot. Le caractère strictement calviniste du Mot de maçon ne semble avoir perduré depuis son origine (apparemment un peu avant 1630) que jusqu’à la fin du XVIIème siècle (Edimbourg de 1696), même si dans ce Mot les matériaux typiquement calvinistes continuèrent à être transmis comme l’attouchement des « cinq points » et le mot de maître « Marrow Bone ».
(67) « .….et le mot de maître » marrow bone » .
Le mot de maître se traduirait par » os a moelle « .
Plus réellement on retrouve dans la definition de l’Arche Royale, le mot « marrow » .
L’Arche Royale est alors qualifiée de » moelle » de la franc maçonnerie.
Lorsque Schaw demanda à la loge calviniste de Kilwinning de pratiquer un art de mémoire (en remplacement dis-je du rite anglican des A.D.), il n’avait aucune idée du type d’art de mémoire que pratiquerait cette loge si ce n’est que ce devait être un art de mémoire calviniste (c’est-à-dire, dis-je, un art de mémoire qui, conformément aux principes de la Réforme, se composerait exclusivement de matériaux scripturaires – à la différence des A.D. qui accumulaient les matériaux non scripturaires – et d’images verbales et non plastiques).
Tout acte de mémoire (comme l’apprentissage d’un dialogue de théâtre) n’est pas pour autant une pratique de l’art de mémoire. Mais lorsque cet acte de mémoire consiste à évoquer oralement et mentalement l’architecture du temple de Salomon dont les éléments symboliques se trouvent liés à des concepts, cela peut être un art de mémoire.
Réponse au post 56. Les ouvrages publiés avant Schaw sur l’Art de la mémoire sont très variés. La plupart ne sont pas focalisés sur l’hermétisme. Et je ne suis pas sûr que Schaw songe à encourager les maçons de Kilwinning à le développer dans cette voie quand l’ensemble de son texte est consacré aux aspects pragmatiques juridictionnels. Rien ne permet de le dire.
Le fait de trouver des phrases sur la mémoire dans son texte, aussi bien que dans une abondante littérature extérieure, ne signifie pas que chaque occurrence renvoie à l’Art de la mémoire. Les auteurs classiques sur cet Art distinguent eux-mêmes les activités spontanées ou exercées de la mémoire (avoir bonne mémoire, être digne de mémoire, entretenir la mémoire, etc.), d’un travail méthodique à l’aide de repères visuels (images, panoptiques, une maison réelle, un paysage urbain) ou sonores (rimes, rythmes, métaphores, condensations lexicales, etc.).
Dans le livre de métier d’Etienne Boileau (1268), on trouve de constants rappels à avoir une mémoire fidèle pour bien restituer 1°) les secrets de chaque métier (tours de main, recettes, etc.), 2°) l’historique de celui-ci, ne serait-ce que pour donner légitimité à certaines revendications (privilèges d’ancienneté, calcul de l’imposition fiscale, exonération du guet, etc.), 3°) les obligations d’un contrat quand il n’est pas formalisé par écrit, ce qui est le cas le plus fréquent (outre les contractants, importance des témoins qui doivent avoir bonne mémoire).
Je me demande d’ailleurs si, après Schaw, les loges impliquées dans et par les Statuts ont vraiment cultivé cet Art (hermétisme selon certains, lié aux aspects techniques selon moi). Je me demande s’il ne s’agit pas d’une exhortation dont l’effet est resté limité et peu durable. Il faudrait réunir une documentation précise sur le sujet. Pour le moment, le grand déficit des sources crée un empêchement. Mais j’observe que celles produites dans la seconde moitié du 17e siècle poussent au scepticisme. Plus encore, je pense que si David Stevenson n’avait pas évoqué cet Art (à partir de Yates), le débat n’existerait pas.
D’ailleurs, je n’ai pas la même lecture que lui de Yates. Non seulement cet auteur (faut-il féminiser : auteure) suggère, avec prudence d’ailleurs, de faire des rapprochements entre franc-maçonnerie et Art de la Mémoire en Angleterre seulement (donc pas en Ecosse), mais elle précise bien que, pour support de son enseignement, Giordano Bruno n’employait pas l’architecture réelle des gens du métier mais une architecture imaginaire. Plus encore, Yates évoque les gravures ou tableaux particuliers au grade de la Voûté Sacrée pour légitimer le rapprochement qu’elle fait entre l’Art de la Mémoire et la franc-maçonnerie. Or, ces gravures ou tableaux sont produits au 18e siècle, d’une part, et n’ont pas besoin d’une grande virtuosité mnésique pour être interprété et commenté, d’autre part. Et puis, je ne résiste pas à ajouter que les premiers rituels de la Voûte Sacrée qui ont donné le Royal Arch sont explicitement référencés aux Stuart (Jacques VI d’Ecosse). Conçus par des fidèles de Jacques III (d’Angleterre), Ils sont jacobites, indubitablement jacobites.
« Le fait de trouver des phrases sur la mémoire dans son texte, aussi bien que dans une abondante littérature extérieure, ne signifie pas que chaque occurrence renvoie à l’Art de la mémoire. » A.K.
Dans les exemples cités, la mémoire est reliée à « l’ancienne mémoire », aux « Anciens Usages » ou directement à « L’Art de la mémoire ». Soyons de bon compte! L’article 6 du 28 décembre 1699 (déjà cité) est assez clair à cet égard !
Le lien entre « L’Art de la mémoire » et le milieu opératif peut être fait en évoquant les « Arts libéraux », prégnant dans les Old Charges. Intimement lié à l’apprentissage des « Arts Libéraux », notre « Art » est enseigné pendant toute la période médiévale tant dans les monastères que dans les universités, et ce dans toute l’Europe.
Raymond Lulle développera un autre système, influencé par la gématrie juive.
Nous arrivons à la Renaissance avec Pic de La Mirandole et les Néoplatoniciens qui regrouperont les deux systèmes en les alliant avec l’astrologie et l’hermétisme.Ils visent à une globalisation du Cosmos.
Au XVIe siècle, qui nous concerne, plusieurs traités sur « L’Art de la mémoire » sont publiés: Johann Host von Romberg en 1520 (Venise), Petrus Ravenna en 1545 (Londres), Thomas Wilson en 1553 (Londres et réédité en 1560,1567,1585).
Et Giulio Camillo en 1550 qui présente un Théâtre de la mémoire qu’il réalisera en bois soutenu par « sept piliers de la Maison de la Sagesse de Salomon », en vue d’acquérir « la vrai sagesse ».
Il n’est pas formellement interdit de penser que Giordano Bruno, de par ses déplacements en Allemagne et en Angleterre ait pu être en rapport avec la fondation de la Rose-Croix et de la maçonnerie acceptée du début du XVII e siècle.
Et c’est bien son disciple, Alexander Dickson et nul autre qui est introduit à la cour de Jacques VI d’Ecosse et sera considéré comme maître en l’art de la mémoire…
Le Temple de Salomon est au centre des préoccupations opératives depuis la période moyenâgeuse.
Le Ms Dumfries N° 4 (1700)en donnera une signification mystique.
Les écrits de William Schaw sont assez clairs quant à l’implication de « L’Art de la mémoire » dans un contexte opératif.
Quel était le contenu de cet « Art de la mémoire »(hermétique, mystique, lié à l’art de bâtir ?) est une toute autre histoire…
(post 59) – Je comprends de moins en moins les enjeux d’une problématique strictement religieuse autour du Mot. En effet, quand Adamson en parle, on ne peut en déduire qu’il le connaît. Entre connaître une chose et connaître l’existence d’une chose, il y a un grand pas. Et de nombreuses divulgations de presse ultérieures, vers la fin du siècle, sont dans le même cas. Adamson connaît l’existence du Mot (et des Rose-Croix et du don de double-vue : l’avait il?). On ne peut pas en dire plus. A mes yeux, c’est quand même beaucoup.
Cela posé, qu’Adamson fût presbytérien, je ne l’ai jamais contesté. Je rappelle aussi que la question cruciale est certes de savoir qui est à l’origine du Mot et dans quelles circonstances. Mais, en l’absence de réponse certaine sur ce point, il faut se demander quelles sont les personnes dûment identifiées qui en font usage.
Patrick Négrier pense que l’origine se trouve dans le milieu calviniste presbytérien. Dans ce cas, je ne parviens pas à faire le lien entre ce qu’il en dit et l’Art de mémoire dont Schaw recommande la pratique à quelques loges d’Ecosse. Schaw était catholique !
Le contenu du Mot est révélé à la fin du siècle. Qui peut dire qu’il était le même au commencement ? Je persiste à penser que, sauf argument irréfutable dans certains cas précis, la rétrodiction n’est pas admise ni en histoire des faits, ni en histoire des idées.
A titre informatif, j’ai souvent signalé que des rituels jacobites renvoient à Jacques VI comme roi ayant encouragé la création de la franc-maçonnerie « moderne » ou « spéculative ». Mais j’ai toujours pris garde de me fier aveuglément à des déclarations de l’après-coup. J’observe que les traces documentaires relatives à l’apparition du Mot apparaissent sous le règne de Charles 1er.
Que le Mot soit connu en 1714 au plus tard par le comte de Mar (futur duc) ne s’explique pas non plus par un argument religieux. Mar était indifférent en la matière, néanmoins quand on lui posait la question d’une préférence, il considérait l’église épiscopalienne comme la plus convenable pour la Grande Bretagne.
Cela fait donc un catholique, un presbytérien et un sympathisant épiscopalien dans une même aventure. Leur lien : tous les trois sont favorables aux Stuart.
Il va de soi que j’ai plusieurs autres références, avant la naissance controversée de la GL de Londres, où l’on constate cette même disparité religieuse et ce même lien politique.
Une autre chose me gêne dans la thèse de Négrier. En résumé, elle consiste à dire que le rite du Mot de maçon a été créé entre 1628 et 1637 par les maçons écossais de Kilwinning pour remplacer le rite des anciens devoirs opératifs du Moyen Âge et de la Renaissance (je reprends ici les termes employés dans son ouvrage La Tulip). A cela deux observations. La première est que je connais des anciens devoirs, pas de rite des anciens devoirs ; je connais des textes qui renvoient au Mot de Maçon pas au rite du Mot de Maçon. Mais supposons que cette première observation soit une affaire de rhétorique (simple concession de facilité). La seconde est celle-ci : de quels anciens devoirs s’agit-il en Ecosse à l’époque d’Adamson, Rothes, Traquair et autres ? J’insiste sur le marquage national : en Ecosse, pas en Angleterre. Pour qu’il y ait un processus de remplacement, il faut expliquer ce qui est remplacé, et montrer par conséquent les textes sources qui, si j’ai bien compris, doivent être connus à Kilwinning,. De même, il faut expliquer pourquoi il y a remplacement, et pour qui.
C’est à la loge de Kilwinning que les Statuts Schaw de 1599 ordonnent de pratiquer un art de mémoire : « It is ordanit be ye generall warden, That ye warden of ye lug of Kilwynning, being the secund lug in Scotland, tak tryall of ye airt of memorie and science yrof ».Cet art de mémoire, ce fut le Mot de maçon qui correspond à la nature d’un art de mémoire par deux de ses caractéristiques : 1) il servait à évoquer oralement et mentalement un monument d’architecture sur lequel étaient plaqués des concepts (en 1696 l’Edimbourg mentionne allégoriquement les différents meubles de l’Oulam du temple de Salomon) ; et 2) les questions et les réponses du catéchisme du Mot de maçon devaient être apprises par coeur, c’est-à-dire mémorisées (Confession d’un maçon, 1727).
L’élaboration du Mot de maçon par la loge de Kilwinning transparaît dans le fait que quatre des premiers catéchismes du Mot de maçon mentionnent le nom de la loge comme étant Kilwinning. Cette cité était définitivement passée à la réforme calviniste en 1592, date du départ du dernier abbé commendataire. Swift aussi établit un rapport entre la loge de Kilwinning et le Mot de maçon qui évoquait le temple de Salomon. Il écrivait en 1724 : « La branche de la loge du Temple de Salomon… est comme je peux facilement le prouver la plus ancienne et la plus pure actuellement sur terre : la fameuse ancienne loge écossaise de Kilwinning » (il basait ce propos sur le Contrat de Perth de 1658 qui présentait la loge de Kilwinning comme une émanation du temple de Jérusalem, allusion à la symbolique salomonienne du Mot de maçon pratiqué par la loge de Kilwinning).
Les textes des Anciens devoirs contiennent tous eux-mêmes la description du rite de ces A.D. : il suffit de les lire. Ils rapportent tous la description du même rite : on lisait d’abord le livre des A.D. au récipiendaire puis on lui faisait jurer sur le livre des A.D. de respecter les différents devoirs professionnels et moraux qu’on venait de lui lire. De même il suffit de lire les catéchismes du Mot de maçon (par exemple l’Edimbourg de 1696 qui mentionne l’expression « Mason word ») pour se rendre compte qu’ils décrivent un rite composé de signes, d’attouchements, de questions, de réponses et même d’un serment, même si le mot rite n’est pas employé. Lorsque le New dictionary de B.E. évoquait le Mot de maçon en 1699, il le décrivait comme un rite composé de « a strict Oath, and much Ceremony ».
Dans son ouvrage sur Les Premiers francs-maçons (2000) David Stevenson a dressé la liste des différents Anciens devoirs retrouvés dans quatre loges d’Ecosse qui, après avoir pratiqué les A.D., pratiqueront le Mot de maçon.
Quant au processus de remplacement des A.D. anglicans par le Mot de maçon calviniste qui eut lieu dans les loges calvinistes d’Ecosse comme celle de Kilwinning, il fut notifié en 1724 par Jonathan Swift dans sa Lettre de la grande-maîtresse des franc-maçonnes à M. Harding imprimeur : « Après son accession au trône d’Angleterre, le roi Jacques VI rétablit la maçonnerie dont il fut grand-maître… Après l’exemple donné par le roi, toutes les personnes de qualité furent elles-mêmes reçues franc-maçonnes ; mais elles fabriquèrent une sorte de Manaboleth en anglais, en imitation de l’ancien et véritable Manaboleth ».
Bonjour à tous!
Je souhaite également profiter de la présence d’André Kervella dans cette échange pour dire combien précieuse est la lecture de ses ouvrages.
Reconstituer l’histoire revient à décrire un déroulé des événements compatible avec tous les indices connus, avec l’espoir que certains éléments de ce déroulé puissent, par leur unicité, être considérés comme certains.
André n’a pas son pareil pour découvrir de nouveaux indices, ou du moins attirer notre attention sur des indices connus mais oubliés ou laissés à l’écart.
Après avoir (il n’était pas tout seul) révolutionné notre connaissance du Chevalier Kadosh, il a fait progresser celle du Royal Secret, notamment avec le diplôme de Bouillon, et nous fournit à ce propos dans son dernier ouvrage, non pas une certitude, mais une fameuse piste de réflexion. S’il lui vient un jour l’envie de travailler sur le 33e degré et les Grandes Constitutions, problèmes dont la connexité incite à adopter un peu trop vite des hypothèses dangereuses, je lirai ses réflexions avec grand plaisir.
On peut ne pas être d’accord avec toutes ses conclusions (c’est le propre de la recherche historique), mais on ne peut ignorer ses découvertes et arguments.
Merci bien. Un travail sur le 33e grade du REAA peut être réalisé sans problème. C’est surtout la documentation américaine qui renseigne sur les conditions de son apparition, d’ailleurs fort troubles. Même chose pour les Grandes Constitutions. Deux personnages clefs : Mitchell et Dalcho.
Eh bien, je pense qu’il faut surtout diriger nos regards vers la Prusse, avec les « signataires » de la version latine, le comte de Goltz et Jacques Duval d’Esprémesnil. Nous avons actuellement bien plus de moyens d’investigation que Jean-Pierre Lassalle en avait il y a vingt-cinq ou trente ans (merci Google…). Excellente journée!
Peut-être que oui, peut-être que non. Duval d’Esprémesnil a été fait 33e par Grasse-Tilly avant le 23 octobre 1804, mais pas avant le printemps. Il n’a donc pas contribué à la création du grade aux Amériques L’indétermination sur la date de son élévation est due au fait que le Livre d’Or de Grasse-Tlly contient des manques (f° 40 et 69). On sait que D’Esprémesnil contresigne la patente de Louvain de Pescheloche le 23 octobre, on voit son nom dans un tableau récapitulatif sans aucune information de date sur son entrée dans le REAA. On y lit seulement sa date de naissance en 1770, cela exclut donc une participation à l’écriture les Constitutions de 1786 (mais il est vrai que cette date est proposée par les rédacteurs de manière trompeuse). En tout cas il n’a pas émigré aux Amériques, il a servi quelque temps après 1794 dans dans le régiment de Rohan levé pour se mettre au service de l’Angleterre.
J’ai plusieurs Goltz dans ma base de données, y compris l’un d’eux qui fut dans les relations du comte Marischall à Berlin au milieu du 18e. Mais Je n’ai aucune information dans le Livre d’Or. Duquel s’agit-il ? Il n’a pas excité ma curiosité jusqu’à présent.
Duval d’Esprémesnil déclare explicitement « avoir accepté la confirmation du dit grade à nous déjà conféré en Prusse et dont les circonstances nous ont fait fait perdre le diplôme ». Ceci a été depuis longtemps été repéré par Eric Stoll et Jean-Pierre Lassalle.
Ce dernier nous apprend en outre que le 10/2/1819 l’Orateur du SC « Prado » fait part des condoléances pour le décès de Pyron et du « Très Illustre Frère le Maréchal comte de Gol(t)z, doyen des Inspecteurs Généraux ». Il n’y a malheureusement pas d’indication de la source, mais il y a sans doute là aussi une piste à suivre.
Connaissez-vous un métier ou autre occupation humaine, professionnelle, artistique, ménagère ou de loisir, où la mémoire ne joue un rôle essentiel ?
Qui a le malheur d’observer un dément s’en rend compte !
Bien sûr, la mémoire est une capacité qui fonctionne à chaque seconde de notre existence, qu’on exerce un métier ou qu’on contemple le ciel ! Il m’est arrivé de commettre autrefois, quand Internet n’existait pas encore, un bref essai sur José-Luis Borgès qui montre bien tout cela, sans psychologisme.
La problématique relative à l’Art de mémoire ne néglige pas cette première évidence. Elle entend seulement ajouter à la mémoire qu’elle qualifie de « naturelle » des techniques (un Art) qui, appliquées à des domaines précis, sont supposées fournir des moyens de retenir des connaissances complexes.
L’inconvénient est que les auteurs qui ont théorisé à ce sujet n’ont jamais pu faire école, ou peu. Leurs techniques sont trop centrées sur l’expérience subjective.
Dans les métiers de la construction, ce sont des techniques empiriques, sans complications abstraites, qui ont longtemps été enseignées par ce moyen. On en connaît les limites, ne serait-ce que par l’effondrement de certaines cathédrales avant même qu’elles fussent achevées. En tout cas, c’est bien pourquoi il faut se garder d’extrapoler quand on prétend que l’Art de mémoire, dans les loges encore opératives, était focalisé sur les aspects ésotériques. Preuves ? Aucune.
L’utilisation du « Mot de Maçon » fut assez étendu dans les différents milieux sociaux avec des connotations variées.
Si on prend en compte les dires du Presbytère de Kelso (1656), ce « Mot » était d’application chez les pasteurs, les maçons et les professeurs « dans les temps les plus purs de l’Eglise Presbytérienne » à savoir avant 1610. Il est précisé que « les hommes ayant ce Mot ont été et sont tous les jours dans nos cessions ».
Son origine mythique le rattache au Roi David « quand il faisait tailler les pierres dans la montagne pour reconnaître les ouvriers des travailleurs » ( Ms Dumfries N°4).
Il pénètre dans la noblesse(du moins documentairement parlant) avec le comte John Stewart (dans le conflit entre Charles Ier Stuart et l’Eglise Prebytérienne)qu’on accuse de le posséder dans sa caste.
Il fut considéré, tant dans le peuple, que parmi la noblesse, comme étant « l’oeuvre du démon ». Une croyance se répandait que ceux qui possédaient le « Mot » pouvait voir « l’invisible ».
On le rattachera aux Rose-Croix dans l’ode funèbre pour John Gall par Henry Adamson qui fut Maçon Accepté de la Loge « Scone and Perth N°3 », maître de chant et doyen de la Guilde des marchants, prévôt de la ville de Perth.
En 1649, l’Eglise Prebytérienne d’Ecosse s’inquiète de la propagation de ce « Mot » chez ses ministres du culte…
En 1653, un ouvrage publié par Sir Thomas Urquhart of Cromatarty traitant du langage universelle fait dire dans la bouche d’un jeune homme que la vertu du seul « Mot de Maçon » suffit à faire venir à lui « un Maçon qu’il n’avait jamais vu ».
Un certain révérend Georges Hiekes, chapelain du duc de Lauderdale, indique qu’il est également accordé aux membres de la Gentry dans les années 1670.
Le pasteur d’Aberfoyle, Robert Kirk, le définissait en 1691 comme étant « Une sorte de tradition Rabbinique sous forme de commentaire sur Jachin et Boaz… »
« L’ Art de la Mémoire », introduit par Alexander Dickson (qui fut considéré comme « maître en cet Art ») à la cour du Roi d’Ecosse en 1592, peut-il se rapporter au « Mot de Maçon »?
Le Roi Jacques VI décida que la connaissance de cet Art « serait une qualification nécessaire pour devenir membre des Loges écossaises ».
Rien de plus…
Alors, le « Mot de Maçon » : origine religieuse, politique, mystique, magique…?
Comme j’ai fourni en 2000 une bonne partie de ses références dans mon article « Le Mot de maçon et ses tropismes » (Points de vue initiatiques, no 119), je ne peux qu’approuver celles du post 48. Reste quelques ombres
1°) Quelle est la source qui permet de dire que Jacques VI décida que cet Art serait une qualification nécessaire pour devenir membre des loges écossaises ?
2°) Même question pour le rôle joué par Alexander Dickson à la cour ?
3°) Même question pour le chapelain du duc de Lauderdale.
Merci de m’éclairer.
Réponse à André Kervella (post 54) dont je salue au passage le sérieux de ses études et recherches.
1°) Soyons clair, ce dont je fais état ici est bien « L’Art de la mémoire ».La source ? Les nouveaux statuts que Schaw élabore et qui redéfinissent les règles de métier applicables aux apprentis entrés, aux compagnons et maîtres maçons « opératifs ». Il introduit en 1599 la notion de mémoire et d’art de mémoire. Plusieurs notifications à cet égard. En vrac:élection par le surveillant de Kilwining des « plus dignes de mémoire dans le métier…en ce qui concerne l’art, le métier, la science et l’ancienne mémoire »,le compagnon de métier « ne sera pas admis sans un essai satisfaisant et sans que sa mémoire et l’art du métier n’aient été éprouvés par le surveillant diacre et les maîtres du district de la Loge, conformément aux anciens usages… »,il est ordonné que le surveillant de la Loge de Kilwinning « seconde loge en Ecosse, éprouve chaque année l’art de mémoire et la science de chaque compagnon de métier et chaque apprenti selon la vocation de chacun, et que ceux qui auront oublié un point enseigné paient une amande comme suit à la caisse… »
Même si les statuts Schaw ne seront pas enregistrés par le roi en raison de la contestation de la Loge de Kilwinning ce qui aurait pu engendrer des controverses civiles et religieuses, Jacques VI est un passionné d’architecture et d’hermétisme. Il étudie les Arts Libéraux et privilégie l’Art de la mémoire…
2°)Et on en vient à Alexander Dickson. C’est un disciple de Giordano Bruno qui développa sa vie durant « L’Art de la mémoire » dans une optique hermétique. Dickson est un écossais catholique vivant à Londres. Il publie en 1584 un traité de la mémoire basé sur la tradition hermétique. En 1592 il est admis à la cour de Jacques VI et est considéré comme maître dans cet Art.
3°) Source: « Lettre du Révérend Georges Hickes au Duc de Lauderdale ». Cité par Bernard E. Jones dans « The Freemason’s Guide and Compendium ». Lettre non datée mais qui a été évalue vers 1677. Ce texte mentionne le « mot de maçon » comme moyen de reconnaissance et laisse entendre, à propos des seigneurs de Rosslyn, que le privilège du mot de maçon n’est pas limité aux maçons opératifs de métier, mais qu’il est aussi accordé aux membres de la Gentry qui les contrôlent et les protègent.
(Post 42) – Comment relier l’Art de la mémoire et le Mot de maçon, d’après les statuts Schah? Quels sont les documents qui permettent de le faire? La même question se pose au temps des guerres civiles britanniques. En tout état de cause, l’auteur qui a introduit la problématique de l’Art de la Mémoire en franc-maçonnerie est David Stevenson, après que Frances Yates eût suggéré de faire un rapprochement entre des tableaux (tardifs) de loge écossaise (tiens donc !) et cet Art. Il est permis d’exprimer un point de vue semblable, à condition de l’argumenter. Il est également permis de ne pas être d’accord, à la même condition.
Donc, pas d’accord, argumentons.
Schaw ne fait jamais que proposer pour l’Ecosse une organisation du métier analogue à celle préconisée en France au même moment. Il existe deux versions des statuts établis sous sa direction. La première est écrite en 1598 avec le projet d’une application générale dans l’ensemble de l’Ecosse. La seconde est écrite l’année suivante surtout à l’intention de la loge Kilwinning, reconnue deuxième du pays, afin de définir ses prérogatives juridictionnelles dans la région qu’elle aspire à contrôler. Dans les deux cas, les recommandations ou prescriptions qu’on y trouve ne divergent pas sur l’essentiel de celles édictées depuis longtemps en France. Le critère décisif, selon Stevenson, est l’importance accordée par Schaw, au moins dans les seconds statuts, à l’Art de la mémoire. « Les trois simples mots Art of Memory peuvent être pris comme preuve de ce que, dès leur début, les loges de Schaw étaient imprégnées au moins par les marges de la pensée occulte et mystique de la fin de la Renaissance. » Non seulement, il s’agit là d’une extrapolation que l’ensemble du texte ne justifie pas, tant il ne quitte nulle part le plan des affaires concrètes, mais réduire l’art de la mémoire au champ de l’occulte ou du mystique est une témérité à laquelle je me refuse pour les raisons suivantes.
En 1599, l’article VI des Statuts Schaw dit que le garde de Kilwinning doit nommer six membres de sa loge pour examiner les qualifications de tous les maçons de la juridiction «sur leur art, métier, science et ancienne mémoire». Le dixième dit la même chose pour tout nouveau compagnon reçu : un examen permet de déterminer s’il peut fournir une preuve suffisante qu’il possède la mémoire et l’art de son métier. Le treizième est le seul qui emploie « art de la mémoire » pour affirmer qu’il faut constamment l’exercer et que des amendes peuvent être infligées aux oublieux, y compris les apprentis. De ces occurrences différentes, il faut comprendre quatre choses.
Premièrement, l’ancienne mémoire du métier est celle de son passé le plus lointain, telle que les traces ont été conservées parmi les vivants ; et ce sont principalement les lois et coutumes du métier. Les textes français, principalement parisiens, sont irréfutables sur ce point, tant sont fréquentes pour de nombreux métiers cette insistance à dire que les artisans doivent se souvenir de ce que les générations antérieures leur ont transmis. Les Old Charges anglaises elles-mêmes sont conçues à cette fin, quitte à verser dans la légende, et dans les Constitutions (en 1723 et 1738), Anderson ne fait rien d’autre que concevoir son commentaire pseudo historique sur le même mode.
Deuxièmement, dès l’antiquité, l’art de la mémoire tel qu’il est appliqué au quotidien du chantier est un procédé mnémotechnique destiné à fournir des recettes pour tracer des figures ou symboles, pour les combiner en sachant respecter les contraintes des matériaux, pour marquer au sol les repères d’une fondation, pour formaliser les proportions d’un bâtiment et des espaces intérieurs. Qu’il ait été surtout conceptualisé par des orateurs grecs et latins désireux d’astuces pour bien retenir l’ensemble d’un long discours, et qu’on ait retenu leurs écrits pour le focaliser sur la rhétorique, n’empêche en rien de rappeler qu’il était également mis en œuvre afin d’aider au rappel des connaissances très pragmatiques déduites de la géométrie, en se contentant d’ailleurs de calculs rudimentaires effectués de tête, ce qui va de soi chez des hommes n’ayant pas reçu une instruction écrite. Tirer Schaw vers l’occulte ou le mysticisme est donc une hardiesse assez surprenante.
Troisièmement, le seizième siècle est celui où l’on s’efforce d’expliquer les phénomènes mnésiques par le fonctionnement matériel du cerveau et par les effets de l’alimentation ou du climat sur l’activité cérébrale. Pour en avoir l’illustration, il suffit de lire le traité publié en 1553 à Bâle par le médecin italien Guglielmo Gratarolo, traité au demeurant dédié au très jeune roi d’Angleterre Edouard VI qu’il qualifie de « roi vraiment chrétien ». Ce traité est d’abord traduit en français par Etienne Coppé en 1555 , puis en anglais par William Fulwood en 1562 et imprimé à au moins trois reprises jusqu’en 1573. On y trouve dès le premier chapitre un développement là-dessus. L’intérêt de fortifier la mémoire est alors mis en relation, tout simplement, avec celui d’accumuler certes des connaissances, mais aussi de manifester une grande sagesse. Gratarolo se montre surtout préoccupé par les règles qui garantissent une bonne hygiène de vie, des mœurs équilibrées, et conditionnent du même coup un bon travail intellectuel et manuel, surtout orienté vers l’utile. Il me semble que, dès lors qu’une édition en langue anglaise existe du vivant de Schaw, d’autant que la traduction de Fulwood connaît plusieurs réimpressions, c’est plutôt vers elle qu’il est enclin à se pencher. C’est là une hypothèse, et je l’avance comme telle, mais elle contrebalance le propos de Patrick Négrier qui avance quant à lui un postulat, faute de preuve documentaire.
Quatrièmement, le succès des écrits sur l’art de la mémoire chez les architectes d’autrefois s’explique par les différents jeux de comparaison que les auteurs depuis l’Antiquité grecque font entre l’espace mental et un bâtiment à plusieurs pièces. En plus des souvenirs qui s’impriment spontanément en nous, il y a ceux que nous faisons l’effort de retenir parce que nous avons le sentiment d’en avoir besoin dans le futur. C’est le cas des connaissances qui constituent un corps de science pratique ou théorique. Leur rétention est facilitée par la mise en œuvre de procédés techniques, notamment en leur associant des images, des signes ou des symboles à répartir dans une grande maison ou un paysage urbain, selon un ordre choisi par chaque individu. Encore faut-il insister sur le fait que cette individualisation des représentations ainsi enregistrées dans l’esprit n’est pas transférable vers autrui. Elle dépend étroitement des vécus personnels, en cela que ce sont les goûts, les émotions, les préférences affectives qui déterminent l’organisation de cette architecture intérieure. L’art de la mémoire dit pourquoi il faut loger des connaissances dans une maison, il énonce quelques principes de son organisation, mais il ne dit pas comment elle est, chacun l’aménageant à sa fantaisie. Partant, si on se limite à le concevoir ainsi, si on en fait le moyen de systématiser des métaphores à valeur seulement idiosyncrasique, on ne voit pas pourquoi Schaw le préconiserait aux maçons de sa juridiction. Il ne leur sert à rien, au contraire de l’apprentissage des leçons propres au métier, lesquels doivent satisfaire à des standards communs.
J’ajoute qu’au dix-septième siècle des penseurs renommés n’hésitent pas à contester ceux qui ne font que l’éloge de ces connaissances soi-disant cachées, auxquelles ne pourraient avoir accès que les experts du procédé, sans jamais convaincre d’ailleurs personne. On le vérifie sans peine chez René Descartes ou Gottfried Wilhelm Leibniz, entre autres, lesquels empruntent du reste quelques idées à Gratorolo , si bien qu’une désaffection est indéniable quand on croit que les loges de maçons, au contraire, persisteraient à l’entretenir, voire à l’amplifier. Iraient-elles à contre-courant d’une tendance socioculturelle lourde, celle qui va conduire aux Lumières, ces Lumières dont curieusement ont prétend qu’elle seraient aussi à l’origine des spéculatifs ?
Donc, si je résume, rien ne permet d’affirmer que Schaw pense Mot de maçon quand il pense Art de mémoire. Rien ne permet de suggérer que, plus tard, ceux qui pensent Art de mémoire (dont on aimerait savoir si les loges l’ont réellement mis en pratique) pensent Mot de maçon. Rien ne permet de prétendre, non plus, que le Mot évoqué (sans être révélé) dans les années 1630 satisfait au même contenu à la fin du siècle, moyennant quoi la rétrodiction est illégitime. Quant au comte de Mar, il possédait bel et bien le Mot en 1714, et son appartenance religieuse n’avait rien à voir dans l’affaire.
je profite qu’André Kervala fréquente ce blog pour vous remercier très chaleureusement de votre travail qui fera date dans les études historiques sur la franc-maçonnerie, contrairement à d’autres qui sont abondamment édités et qui ne font que colporter bien souvent que le mythe de la FM. J’ai beaucoup apprécié votre travail sur l’effet Morin et sur Hund et la filiation chevaleresque quand à votre ouvrage sur le tri-centenaire de la FM, un régal (1717). Je ne peux qu’inciter tous les freres à lire vos ouvrages qui malheureusement sont pour beaucoup épuisé.
Sa biographie de Ramsay est également d’une rare qualité.
Merci beaucoup. L’heure du repos, dit-on, n’est pas arrivé. Mais comme le travail d’écriture est un plaisir, j’espère bien continuer dans la même voie longtemps encore.
Laissez hors de vos débat ce pauvre Mr Adamson qui n’y est pour rien.
Henry Adamson (1583-1639), était le fils de James Adamson qui fut Dean (doyen) de la guilde des marchands puis prévôt de la ville de Perth (est de l’Ecosse, à côté de Dundee). Destiné à la prêtrise ‘(« épiscopalienne ») comme son oncle Patrick (qui fut archevêque avant d’être destitué par la réforme protestante), il devint instituteur dans sa ville natale.
Il publia son poème « Les lamentations des muses ou les complaintes enjouées à l’occasion de la mort de Mr Galll » en 1638 (un an avant sa mort à lui, Adamson). Ce poème, en neuf “muses” (relatant une descente printanière de la rivière Tay par Mr Gall et un de ses amis, nonagénaire, lequel évoque, non sans les regretter, les dévastations de la ville de Perth par les insurrections protestantes) évoque les incidents de l’histoire écossaise, les particularités de la ville de Perth et loue les qualités de Mr Gall, ami de l’auteur, mort prématurément. Jeune homme plein d’esprit, appréciant les plaisanteries, bon compagnon et bon vivant, ce Mr Gall appréciait la musique et la danse. Il aimait le curling (cette espèce de pétanque sur glace), le golf et surtout le tir à l’arc (la première « Muse » décrit avec entrain un exercice de ce sport et la dextérité de Mr Gall.).
Il était tout l’inverse du calviniste classique, sévère, triste comme un jour sans pain, condamnant la musique et les distractions, imprégné de cette conviction que l’homme depuis la faute originelle est un mort vivant qui ne peut qu’espérer que le christ le choisisse au nombre des élus.
Un an après l’apparition de ce poème, débute la guerre dite « des évêques », le parlement écossais refusant la volonté du roi Charles I (un Stuart !) de rétablir la primauté des évêques dans l’église d’Ecosse. C’est le début de 12 ans de guerre qui ne se termineront que par l’exécution du roi en 1649.
Or Mr Gall, comme son ami Adamson, était royaliste et exaltait la puissance royale sur les deux royaumes, comme en témoignent ces vers de la. seconde Muse (p 23) :
Then reigne, great Charles, our nostrels svveetest breath,
Long may thou reigne Defender of the Faith,
Inthron’d among these vvorthie peerlesse pearles,
And let all say, God save our good King Charles;
Que long soit ton règne, Charles, défenseur de la foi !
Le passage toujours cité où Gall annonce la reconstruction du pont sur la Tay, emporté une dizaine d’années auparavant par une crue, est clair. Après avoir affirmé qu’il était rose croix, qu’il possédait le mot de maçon et le don de double vue (clairvoyance), il prévoit (il dit « voir ») la reconstruction du pont. Sur ce pont sera gravé en lettres d’or l’acrostiche du nom du roi, Carolus Rex, avec les écussons d’un roi de Grande Bretagne. Ce n’est pas là langage d’un partisan des synodes presbytériens.
« In fair acrosticks Carolus Rex is seen,
Describ’d upon that bridge in perfect gold,
By skilfull art this cleerlie we behold,
With all the scutcheon of Great Britain’s king, »
Ni Mr Gall ni Adamson n’étaient, que je sache, « maçons » et aucun des deux ne paraît avoir eu la sévérité ou plutôt la rigidité calviniste qui, il faut le dire, transpire l’ennui et rappelle ce qu’on appelait, en 1950, « les dimanches anglais »..
Très juste !
On lit sur internet : « Henry Adamson (1581 – 1637) was baptised on 11 November 1581. Henry set out to train as a priest after his uncle Patrick Adamson, but instead became a schoolmaster in his home city. He was appointed Precentor and singing master of the Sang School (a school for teaching church music) in March 1618 and reader of the Kirk of Perth on 3 May 1620. In 1620 he married Katherine, daughter of William and Helen Buchanan. By March 1626 he had been appointed clerk of the presbytery of Perth. Having received a manuscript copy of The Muses Threnodie, William Drummond of Hawthornden (in a letter dated 12 July 1637), urged Adamson to publish the work. Adamson died before in May, but his brother, John Adamson brought the work into print ».
Henry Adamson n’était pas seulement calviniste presbytérien, il était un acteur majeur du presbytère calviniste de Perth. On lit dans John WILSON, The Presbytery of Perth, 1850 : “ Mr Henry Adamsone was Clerk in March 1626, when “ the former Buk of the Presbyterie was deliveryt to him by Mr John Cruickshank .” He seems to have been appointed to the office some years before, and continued therein till his death in 1637. He was also Reader in the church of Perth, as appears from the following minute of date May 3d, 1620 : “Whilk day the Moderator and Brethrein having knowledge and consideration of the good gifts of Mr Henry Adamson’s, Reader in Perth, admitted him to teitch publicly in the Parish Kirk of Perth, or elsequhair as he sal be employed”. After the death of Mr Adamsone, the Presbytery resolved that the Clerkship should be held by a minister, and that the appointment should be
only for a limited period as appears from the following minute Perth, March 24, 1637 : “Because of the death of Mr Henry Adamsone, last clerk of the Presbyterie, it is appointed that in tyms coming ane actual minister sal be chosen clerk etc.”.
Rappelons à ce sujet ce que désignait un « clerk of presbytery » dans le calvinisme écossais : « The stated or principal clerk takes minutes and deals with the correspondence of the presbytery, and is often appointed for an indefinite term. Presbytery Clerks are the ecclesiastical administrators and generally regarded as substantially influential due to their greater experience of the governance of the church and their ordering of the business of the presbytery. They are thus very much more than secretaries and often in fact are the lynch pin of the organisation”.
La position socialement dominante de Henry Adamson dans le presbytère calviniste de Perth l’a inévitablement mis en contact avec les maçons calvinistes presbytériens de la loge de Perth, et c’est probablement ce contact qui lui fit connaître l’existence du Mason word apparemment pratiqué par la loge de Perth comme le laissera entendre le Contrat de Perth de 1658.
Il y a décidément un gros problème, et il se résume ainsi en 2 volets. 1°) Patrick Négrier nous dit qu’Anderson a communiqué en 1714 le Mot aux fondateurs de la GL de Londres. Comme on ne trouve pas ce Mot ni dans les Constitutions ni dans le registre de la GL, on ne peut que s’interroger sur ce qui justifie un tel point de vue. On peut aussi discuter la date de 1714, mais c’est une autre affaire. 2°) Après la publication des Constitutions, plusieurs lecteurs de l’époque en dénoncent les termes, et plusieurs évoquent le Mot. Autrement dit, ce sont les adversaires du pasteur presbytérien qui se manifestent alors et qui lui reprochent de ne pas comprendre grand-chose à ce qui serait (d’après eux) l’authentique tradition. Comment Négrier explique-t-il cette situation ?
Pour ce qui concerne le REAA, je dis dans mon livre dans quelles circonstances les Français autour de Grasse-Tilly en sont arrivés à employer l’expression Rite Ancien Accepté puis Rite Ancien et Accepté. Aucun rapport avec le Mot de Maçon.
Je ne m’intéresse pas au REAA mais achèterai et lirai avec grand intérêt la biographie à paraître de André Kervella sur Anderson car ce sujet concerne la période qui m’est chère (je ne m’intéresse pas directement à ce qui va au-delà de 1751). Je parlerai ici seulement de ce que je pense de l’origine de l’expression REAA. A mon avis « Rite écossais » renvoyait au fait que les grades au-delà de la maîtrise étaient souchés sur les trois premiers degrés qui composaient le rite écossais du Mot de maçon. « Ancien » faisait référence au fait que le REAA était également souché sur les rituels des Antients (de Dermott). Et « Accepté » renvoyait au fait que la Grande loge de France, un moment en guerre avec les prétentions des « maîtres Ecossais » dans les années 1745 (cf. le livre de Gabriel-Louis Pérau), dut finir par « accepter » l’existence des grades supérieurs à la maîtrise.
Ainsi, d’après le post 32, la méthode consiste à se fonder sur un écrit de 1691 pour procéder à une hypothèse sur ce qui s’est passé longtemps avant cette date. Il suffirait de trouver quelque part l’évocation des colonnes du temple et d’une poignée de mains, pour en déduire que le Mot de maçon, sans être dit, y serait latent. Le problème est que cette méthode consiste à faire parler les silences selon le mode de le rétrodiction. En histoire des faits, sa validité est à juste raison discutée.
Indépendamment de cette première remarque, suffit-il de décréter que le poème d’Adamson où est évoqué le Mot a été écrit en 1628-1630 pour l’attribuer aux calvinistes et en faire une innovation à caractéristique exclusivement religieuse ? Le problème est que ce poème est imprimé en 1638 et que la référence à Charles 1er, déjà malmené par les Covenantaires, y est parfaitement montrée (Carolus Rex).
Dans la même veine, il ne faut pas oublier que le Mot est très explicitement décrit en octobre 1637 comme circulant parmi la noblesse (among the nobility), au commencement de la guerre civile suite au tumulte qui gagne Edimbourg en juillet précédent (pourquoi reporter à 1642 le commencement des troubles ?)
Ne pas oublier, non plus, que l’un des principaux protagonistes de l’épisode qui révèle en octobre 1637 l’existence du Mot parmi la noblesse, est le Lord Trésorier John Stewart, comte de Traquair. Si cela ne renvoie pas à la politique, je souhaite qu’on m’explique pourquoi. Pas de rétrodiction ici, mais un simple constat à partir de la documentation.
Le Mot reparaît parmi les familiers du comte de Mar en 1714, tandis que la George de Hanovre s’empare du trône laissé vacant par le décès de la reine Anne. Comment expliquer ce fait irréfutable par la thèse exclusivement religieuse ? Je rappelle qu’une autre guerre survient en 1715 et que c’est Mar qui commande l’armée jacobite.
Il est possible de citer d’autres sources qui, après 1691 et jusqu’à 1730, sont jacobites et contiennent le Mot. Y compris avec son mode d’emploi, si j’ose dire (colonnes et signes). Je les fournis dans mon prochain ouvrage sur Anderson.
La recommandation faite par Schaw de cultiver l’Art de la Mémoire ne concerne pas le Mot (quel argument pour justifier une telle audace ?)
Allons, une dernière observation pour le fun : sait-on que, pendant les guerres civiles qui s’achèvent avec la décapitation de Charles 1er, la figure d’Hiram apparaît dans certains sermons religieux… eh oui ! Le problème est de savoir dans quel contexte. D’où ma question : est-ce que Patrick Négrier peut nous dire la différence qu’il établit entre l’histoire des faits et l’histoire des idées ?
La référence de la Thrénodie à Charles Ier n’atteste pas que les Stuartistes ont créé le Mot de maçon car les textes maçonniques sont généralement loyalistes en matière de politique. Il faudrait plutôt interroger le fait que le Mot de maçon semble avoir été pratiqué par la loge de Perth, ville qui était calviniste depuis un siècle.
Au XVIIème siècle le Mot de maçon circulait parmi la noblesse mais aussi chez les ecclésiastiques (cf. documentation Harry Carr). Il y a lieu d’interroger la confession religieuse du comte de Rothes dont l’épouse était une fervente calviniste presbytérienne. Quant à Traquair, l’accuser d’avoir le Mot de maçon était le rendre suspect aux yeux du roi qui abhorrait le calvinisme.
J’ignore comment le comte de Mar a eu le Mot de maçon en 1714. A André Kervella de nous dire quelle était la confession religieuse de ce jacobite. A cette époque le Mot commençait à être fort répandu et donc probablement diffus hors de sa sphère calviniste d’origine.
Les Statuts Schaw de 1599 invoquaient la Kirk, présentaient la loge de Kilwinning comme étant la « tête » et seconde loge d’Ecosse (comprendre : la tête des loges calvinistes d’Ecosse alors que Mary’s chapel était la tête des loges non calvinistes), et ils demandaient à la loge de Kilwinning d’élaborer un « art de mémoire ». Cet art de mémoire ce fut le Mot de maçon : non seulement les demandes et réponses des catéchismes symboliques du Mot de maçon devaient être « confiées à la mémoire » et non pas être écrites (comme le dira un catéchisme), mais quatre des premiers catéchismes symboliques du Mot de maçon affirmeront que le nom de leur loge est Kilwinning.
il n’y a qu’une initiation que Guénon a nommé « Tradition primordiale », à tord puisque ceci donne matière à contester une vérité.
L’initiation n’est pas la Vérité, c’est une manière de l’aborder hors de toute croyance et apparence, ceci donc radicalement en opposition avec l’autre maniére de l’aborder : la religion.
Voir la maçonnerie souchée sur la religion est un non-sens.
Voir la Franc-maçonnerie souchée sur la religion est à mon avis une erreur qui s’appuie sur les apparences, ou bien la Franc-maçonnerie n’est aucunement initiatique puisqu’il y a un antagonisme absolu entre l’initiation et la religion, la seconde s’étant construite précisément pour détruire la premiére.
Comme le précise très justement René Lachaud, depuis l’extinction de l’Egypte et la perte considérable que ceci a constitué en termes de connaissances initiatiques par le fait, entre autres, des autodafés de chrétiens, primitifs ou pas, incultes et histériques, les organisation initiatiques ne sont plus que des approximations qui finissent par être profanées par les religions et, de fait, n’ont pour seule vocation que de disparaitre à plus ou moins moyen terme ; l’époque contemporaine a vu une seconde profanation par la politique dont le résultat est rigoureusement identique.
Dans la même veine, les chercheurs/historiens contemporains manquent cruellement d’objectivité, chacun cherche à imposer une nouvelle explication au fait maçonnique, que ce soit du point de vue de ses origines ou de ses buts, les ouvrages produits trahissent tous une volonté à peine masquée de devenir « la référence » en la matière.
Il en résullte des ouvrages composés d’affirmations péremptoires toutes aussi développées que parfaitement subjectives additionnés de chapitres entiers destinés à dézinguer le frangin d’à côté.
Bref, il n’y a plus aucun intéret à lire les sommes assommantes actuelles, ceci tant que lesdits « historiens/chercheurs » n’auront pas décider 1/ d’être objectifs, 2/ de travailler, non pas à une compétition totalement stérile, mais ensembles dans un même but : la Connaissance au détriment de l’opinion.
Ta conclusion est erronée : il faut au contraire lire et relire et faire la part des choses. L’un des mérites d’André Kervella est de sourcer toutes ses (hypo)thèses.
Il m’étonnerait qu’il reçoive la source du commentaire de Blazing Star (intervention 26).
En résumé, lisons le livre qui fait l’objet de cette critique plutôt positive dans son ensemble au lieu de pinailler sur un point précis.
Admettons.
Mais qui est juste, ou du moins approche la réalité ?
Kervella, Dachez, Négrier, Bernheim, pour ne citer qu’eux ?
Quatre auteurs, quatre versions, interprétations TRÈS différentes ?
Pas normal pour des maçons.
Ils ne devraient avoir pour vocation d’entretenir une compétition, mais bien de travailler pour le même objectif : la vérité historique.
Leur opinion nous est totalement égale.
Kervella : FM = politique
Négrier : FM = Bible et Réforme
Dachez : FM = club mondain
Bernheim : FM = pas d’objectif particulier, une sorte de hasard qui ferait bien les choses.
En d’autres termes : tout ceci est pour le moins insatisfaisant et, à mon sens, très en deçà de la réalité.
Je remarque également et bien souvent une crainte de passer pour des charlatants, d’où l’occultation (!!) de tout aspect initiatique, ces théories ayant pour conséquence de ne retenir qu’exclusivement des formes, des objectifs et des conséquences matérielles, soit politiques, soit religieuses, soit sociétales, la réalité de la nature et de l’univers, questions centrales de l’initiation, sont résolues pas la croyance ou l’athéisme, point barre.
C’est pauvre et erroné, car si tel avait était le cas, point besoin de société à l’ésotérisme quelconque, églises et organisations politiques jouant parfairement ces rôles.
Or, il ne s’agit aucunement de cela, il s’agit d’étudier le système initiatique occidental, héritier direct des cultures antiques.
(39) » problématique » bien posée.
Pour ma part je dirais usages hérités de la tradition orale du métier puis copiés dans un contexte clubiste typiquement anglais.
Puis réinventés complètement en France courant XIXe
La franc-maçonnerie aurait completement changé au fil du temps d’où la difficulté à s’y retrouver ?
Que Charleston (Le Old Slave Mart, ancien marché aux esclaves de Charleston, est devenu un musée), La Nouvelle-Orléans, Saint-Domingue, La Jamaïque … aient été des hauts-lieux de l’esclavage comme de la maçonnerie dite « écossaise est bien connu. Que tous les noms connus de celle-ci, à commencer par Morin, Dalcho, Mitchell, Grasse-Tilly … aient profité de ce négoce, «possédé » des êtres humains et traité les esclaves Afro-Américains comme des objets de propriété n’a rien d’étonnant. Chacun sait que des villes comme Bordeaux, Nantes, Bristol … doivent beaucoup de leur prospérité d’autrefois à la traite négrière, commerce « triangulaire » entre l’Afrique occidentale, l’Europe et le Nouveau-Monde.
D’accord sur le fond, mais avec des nuances. Morin, à ma connaissance, ne faisait pas commerce négrier. Il exportait de la pacotille vers les Antilles. Il ne possédait pas une ou plusieurs plantations. J’ignore s’il avait des serviteurs noirs. Cela me paraît assez incompatible avec son mode d’existence: il s’absentait souvent de très longs mois, voire deux ou trois ans de suite.
Au 28 eme grade du REAA appellé au XVII éme siècle A St Domingue : » le noble fouet »
on simulait la frappe de noirs avec des chants. En arrivant en France ce grade à ete expurgé. Le Klu Klux Klan a d’ailleurs repris ce grade avec les décors de l’époque.
Ce point m’a échappé. Quelle est la référence dans les documents concernant Saint-Domngue, SVP ?
26 – inutile de raconter n’importe quoi !
Qu’il y ait un mot de maçon transmis tel ou tel jour, quelle importance?
Quel fut le premier tailleur de pierre, l’inventeur du compas? etc.
Ce qui fait sens c’est la création de structures humaines, loges, obédiences.
Elles sont structurées sur des imaginaires à dominante biblique.
Rechercher l’archéologie de cet imaginaire est passionnant, mais ce n’est pas l’origine de la structure.
Sauf pour des traditionalistes en concurrence les uns avec les autres pour qui l’ancienneté se veut un gage de légitimité.
Je ne sais pas si c’est bien votre rôle de modérateur d’intervenir à plusieurs reprises dans un fil de discussion. Mais je dois sûrement me tromper.
L’importance est moins dans la recherche de l’origine du Mot, quoique pour un historien cet aspect ne soit évidemment pas à négliger, car la pierre de touche de l’histoire est la chronologie ; elle est dans ce qu’on peut dire de sa transmission au fil des décennies. Dans quelles conditions est-il transmis et par qui ?
Certains le présument dans le silence des archives. Ils le logent dans des endroits mystérieux où ils sont les seuls à l’y trouver. Mieux vaut s’en tenir aux seules références qui le citent explicitement comme tel (Mason Word).
Alors on peut établir que certaines loges écossaises dont des membres sont réellement opératifs en ont connaissance (comment ? là est une première question), mais aussi que des personnalités de l’aristocratie sont dans le même cas (même question).
J’observe quant à moi que ces personnalités sont toutes partisans des Stuart.
Jusqu’aux années 1730, la Grande Loge d’Angleterre, sous obédience hanovrienne, n’en tient pas compte. Et certainement pas James Anderson.
Ce fait se remarque aussi dans la comparaison des représentations iconographiques des 2 colonnes Jachin et Boaz. On n’en trouve que chez les partisans ou sympathisants des jacobites.
Les années 1730 sont un tournant dans l’histoire de la GL de Londres, notamment par l’adoption du grade de Maître qui existe depuis au moins une génération chez les jacobites.
« Mieux vaut s’en tenir aux seules références qui le citent explicitement comme tel (Mason Word) ». Ce n’est qu’une partie de la vérité car dès lors que Robert Kirk a établi en 1691 quel était le contenu de ce Mot de maçon (communication des mots Bo’az et Yakin accompagnée de la poignée de main), les différents catéchismes maçonniques correspondant à cette description constituent eux aussi pour l’historien des documents sur le Mot de maçon.
« certaines loges écossaises dont des membres sont réellement opératifs en ont connaissance (comment ? là est une première question) » : On peut répondre à cette question en interrogeant les rapports qui unissent la loge de Perth (« mason word » mentionné dans la « Troisième muse » de la Thrénodie des muses du poète de Perth Henry Adamson, poème de 1628-30 ; mais aussi Contrat de Perth de 1658 qui présente la loge de Perth comme la fille de la loge de Kilwinning) avec les mentions de la loge de Kilwinning (cité calviniste), non seulement dans les Statuts Schaw de 1599 qui l’exhortent à élaborer un « art de mémoire », mais aussi dans les premiers catéchismes symboliques écossais du Mot de maçon qui appellent leur loge du nom de Kilwinning.
Si des Stuartistes possédaient le Mot de maçon, il convient de citer les textes qui feraient état de ce fait et à quelle date. Mais le fait que des Stuartistes aient possédé le Mot de maçon ne signifie pas pour autant que le Mot de maçon fut une création des Stuartistes car à ma connaissance dans la documentation actuellement connue sur le Mot de maçon celui-ci apparaît dans un contexte religieux (calviniste presbytérien) et non dans un contexte politique.
La Grande loge de Londres pratiquait le Mot de maçon dès 1721 (je l’ai déjà dit).
Le père d’Anderson était membre de la loge d’Aberdeen qui pratiquait le Mot de maçon depuis 1699.
Le Mot de maçon apparaît en 1628-30 en lien avec Perth et Kilwinning, bien avant les guerres civiles de 1642-51.
La chronologie n’est pas un but en soi mais seulement un moyen essentiel. L’importance d’identifier le moment premier de l’histoire du rite qui sera appelé plus tard « moderne » réside dans le fait que ce moment premier se trouve lié à une identité culturelle précise : le Mot de maçon et non pas la pensée des Stuart comme le voudrait Kervella. Et en ce qui concerne le Mot de maçon, récapituler son histoire pour la période 1628 (via 1599)-1696 met en évidence le fait que ce matériau culturel n’était pas seulement un surgeon de la tradition biblique : c’était aussi une expression du christianisme réformé, calviniste presbytérien (à André Kervella de nous dire quelle était la confession religieuse des Stuartistes). Voilà ce qui se joue dans l’identification de l’identité culturelle du moment premier : montrer que la maçonnerie appelée plus tard « moderne » est née d’un projet religieux et non d’un projet politique. Et comme symbolique souchée sur la Bible, le rite de ceux qui seront appelés plus tard les « Modernes » ouvre la porte à l’exégèse symbolique de la Bible (le Dumfries n° 4 de 1710 et le Graham de 1726 préciseront d’ailleurs que cette exégèse symbolique de la Bible doit être « typologique »). Telle est la portée de l’identification du moment premier.
Partons sur des bases irréfutables, car les lecteurs de ce blog souhaitent certainement posséder des repères factuellement établis. Qu’est-ce qui justifie la date de 1628, et quel sens donner à la référence 1599 (Statuts Shaw) ?
La Thrénodie des muses se fait l’écho du décès de James Gall qui mourut quelques années après 1628. David Stevenson date ce poème des environs de 1630. Le 12 juillet 1637 la Thrénodie est déjà écrite comme l’indique la lettre reçue alors par son auteur Henry Adamson. On peut donc présumer que la Thrénodie des muses fut écrite entre 1630 et 1636. Date à laquelle existait donc déjà le Mot de maçon.
1°) Adamson est mort en juillet 1637 2°) il écrit son long poème en hommage à James Gall 3°) Son poème est imprimé en 1638 3°) Tout écrivain sait qu’on peut travailler un texte pendant des années 4°) Moi-même, je mets parfois dix ans à écrire un livre (j’en ai 3 ou 4 dans mes tiroirs qui patientent paisiblement que je les reprenne et les actualise par la même occasion) 5°) les deux colonnes du temple sont évoquées dans la littérature britannique avant toutes ces dates 6°) Jacques 1er, notamment, les valorisaient 7°) la question préjudicielle est de savoir quand elles sont comprises dans le Mot de Maçon en association avec la griffe manuelle 8°) je crois qu’il ne faut pas tout mélanger : je parle des personnes qui sont les premières à faire usage du Mot, et ce sont des partisans des Stuart dans un contexte d’abord de fronde puis de guerre, 9°) pourquoi biaiser en ne répondant pas aux questions embarrassantes, car elles sont étayées par des archives irrécusables (cas du comte de Mar, entre autres) ?
Je ne veux pas éterniser ce débat mais je constate
Qu’on ne me répond pas sur les points sur lesquels portait essentiellement ma critique, c’est à dire le lien quasi tabou des fondateurs du REAA avec l’esclavagisme et la traite des noirs à Saint Domingue, ce qui fait qu’il semble délicat, ethniquement parlant de s’y référer et qui expliquerait peut être que l’on cherche à trouver plus en amont des frères plus fréquentables .
Aucun problème pour répondre sur le sujet. J’ai écrit un livre qui s’intitule Frères des Îles où je l’aborde (pour l’instant inédit). Je peux citer les Frères esclavagistes, soit qui négociaient en triangulaire, soit qui employaient des esclaves noirs. Le tout à partir des archives des loges conservées à la BNF (étude intégrale des dossiers de Saint-Domingue, notamment) et de celles consacrées aux épisodes révolutionnaires (dépôts divers : Paris et Aix).
Il me semble qu’il faudrait plus qu’une réponse de Blog (nécessairement concise) pour mettre en lumière la complexité du problème lié à la traite négrière.
Grasse-Tilly possédait une plantation héritée de son père, via sa belle-mère, où il employait 200 esclaves environ.
Les tableaux de loges sont très parlants sur les FF qui étaient dans le même cas, ou avec moins de main d’oeuvre corvéable à merci.
Bacon de la Chevalerie n’a pas participé directement à la fondation du REAA, mais il lui a appartenu, et prônait le conservatisme en matière d’esclavage.
Vincent Ogé, l’une des premières victimes de la répression blanche (Grasse Tilly se flatte d’y avoir participé), était un métis (mulâtre, comme on disait en ce temps). Selon moi, il était aussi FM (j’en juge par sa signature triponctuée, mais je ne saurai être péremptoire).
On attend cet ouvrage avec impatience et tu pourras compter sur notre appuii, car tu seras le premier à faire ce travail de mémoire.
Pour ma part ayant lu Critica Masonica Vol 2/2 n°4 de juin 2014 en particulier le texte de Eric Saunier sur Les négriers et la Franc-Maçonnerie. Les pratiques culturelles dans un port de traite: Le Havre à la fin du XVIIIème siècle-35
L’on peut effectivement penser que le Rite « ne s’est pas enrichi par cet épisode au contraire de ses pratiquants » mais chacun sait que c’est la franc-maçonnerie qui est belle pas toujours les frères
Stop j’arrête
JF
Il n’est pas inconséquent de ma part de dire que je suis d’accord avec les exhortations à la courtoisie et bienveillance. Et je comprends parfaitement que certains lecteurs puissent souhaiter une modération de ton quand il glisse vers la polémique. Il s’avère cependant que le problème est complexe.
1°) Il m’arrive de lire moi-même des auteurs qui exprime leur désaccord à mon encontre (c’est leur droit), en des termes très agressifs. J’ai à cet égard une liste de quasi anthologie sur les propos les plus virulents. Il me paraît donc adapté de leur assurer la réplique au niveau qu’ils choisissent eux-mêmes, en divergeant quand même sur la méthode, au sens où j’évite les attaques ad’hominen (je préfère ne pas citer ici les abonnés au genre) pour me focaliser sur la discussion des thèses.
2°) S’agit-il d’écrire des livres d’histoire, avec les usages de cette discipline, ou des livres de francs-maçons pour des francs-maçons, en évitant ce qui gêne ? Je privilégie la première option, et c’est bien pour cette raison que je pense nécessaire de produire la preuve de ce qu’on avance, non à partir du travail d’autrui mais à partir de l’examen des archives. Bien sûr, il n’est pas toujours possible d’y avoir accès, et d’excellents confrères peuvent émettre des analyses d’une forte pertinence ; mais, rien ne remplace la confrontation aux documents sources.
3°) Je n’ignore pas les enjeux de certaines pratiques familières aux abonnés de la contestation, je connais les paradoxes de ceux qui reprochent à des tiers ce qu’ils tolèrent chez leurs amis (quel étonnement, parfois, de remarquer qu’untel déplore chez un contemporain ce qu’il pardonne volontiers à un prédécesseur ou un alter ego de sa coterie, de son obédience ou de sa maison d’édition !). De ce point de vue, les indignations (ou les encensements) sont sélectifs. J’en comprends les raisons, autour du principe de plaisir/déplaisir, mais je m’interroge alors sur le gain apporté à la connaissance du fait maçonnique, laquelle doit malgré tout être aussi impartiale et argumentée que possible.
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– Dans la mesure où Patrick Négrier entre dans le débat en focalisant sur la « hâte à conclure », voici une illustration de ce qui pourrait être un questionnement serein. Dans son ouvrage La Tulip, je lis ceci « L’expression Mot de maçon désigne depuis au moins 1637 le rite maçonnique qui sera retransmis moins d’un siècle plus tard (1725) à la France puis au monde par la Grande Loge de Londres qui l’avait elle-même reçu en 1714 du pasteurs écossais James Anderson. » (p. 35). Qu’est-ce qui fonde une telle assertion ?
1°) Personne n’est capable de dire qu’en 1725 le Mot ait été transmis à la France ; quels sont les documents qui le prouvent ?
2°) Qu’est-ce qui permet de retenir 1714 comme la date où Anderson aurait participé à la formation de la Grande Loge de Londres ?
3°) Qu’est-ce qui permet d’affirmer qu’il a transmis le Mot aux pionniers de cette GL ?
4°) La lecture de son registre de procès-verbaux ne fournit aucun renseignement sur le Mot.
5°) Les circonstances d’apparition de la Grande Loge de Paris ne sont pas, à ce jour, élucidées, et on ne trouve aucun document qui attesterait une quelconque transmission du Mot, à partir de la GL de Londres, avec laquelle les jacobites fondateurs n’avaient aucune liaison (voir là encore et le registre, d’une part, et la correspondance de ces jacobites, d’autre part). Bref, la meilleure façon d’éviter des impressions subjectives est de donner priorité à la confrontation des matériaux solidement établis.
Le Mot de maçon consistait à transmettre les mots Bo’az et Yakin avec la poignée de main et un serment de secret (Robert Kirk, 1691). C’est ce rite qui a été transmis aux premières loges françaises qui le pratiqueront (HERAULT, Réception d’un franc-maçon, 1737). La Grande loge de Londres pratiquait ce rite en 1723 (Examen d’un maçon publié à Londres) et même depuis 1721 (date à laquelle Désaguliers fut trouvé « qualifié dans tous les points de maçonnerie » par la loge écossaise d’Edimbourg Mary’s chapel qui pratiquait le Mot de maçon depuis 1715). Parmi les membres de la Grande loge de Londres la seule personne qui paraît susceptible d’avoir transmis le Mot de maçon aux quatre loges opératives de Londres qui se fédèreront en Grande loge est James Anderson dont le père était membre de la loge d’Aberdeen qui pratiquait le Mot de maçon depuis 1699.
Le registre de Mary’s Chapel ne dit en rien que Desaguliers a été interrogé sur le Mot. La divulgation faite au lieutenant général de police en 1737 ne permet pas, non plus, d’extrapoler là-dessus. Les registres de la GL de Londres ne permettent pas d’inférer que les divulgations des années 1720 correspondent à son rite. Anderson ne parle jamais lui-même du Mot. Sinon, qu’on me dise où, car ainsi mon prochain livre sera plus documenté.
Ce n’est pas parce que l’on trouve Jachin et Boaz dans la littérature maçonnique que l’on doit automatiquement présumer un rite spécifique qui serait qualifié de « Rite du Mot de Maçon ». Dans quels documents du 17e siècle trouve-t-on cette expression ? Sources factuelles SVP.
Anderson fait allusion au rite du Mot de maçon (qui impliquait un serment de secret et en particulier l’engagement à ne pas divulguer par écrit les modalités de la réception en loge comme la communication orale des deux mots Bo’az et Yakin) dans ses Constitutions de 1723 à l’endroit, où immédiatement après avoir évoqué le temple de Salomon, il dit : « Mais laissant ce qui ne doit pas et en outre ne peut pas être communiqué par écrit ».
Par ailleurs le premier catéchisme symbolique à décrire le Mason word comme un rite de réception en loge est l’Edimbourg de 1696 qui contient l’expression : « The forme of giving the mason word ». Or si le mot « rite » n’est pas employé, c’est cependant bien un rite de réception en loge que décrit ce texte. Et quand le document de 1699 (A New dictionary of the terms antient and modern of the canting crew in its several tribes) mentionne textuellement le « Mason word », c’est comme un rite qu’il le décrit en disant textuellement : « Il est communiqué avec un serment strict et beaucoup de cérémonies (trop fastidieuses pour être décrites) ».
Surprenant !
Comment dire qu’Anderson fait allusion au Mot de Maçon dans le passage suivant ? « But leaving what must not, and indeed cannot, be communicated by Writing, we may warrantably affirm,that however ambitious the Heathen were in cultivating of the Royal Art, it was never perfected, until God condescended to instruct his peculiar People in rearing the above-mention’d stately Tent, and in building at length this gorgeous House, fit for the special Resulgence of his Glory, where he dwelt between the Cherubims on the Mercy-Seat, and from thence gave them frequent oraculous Responfes. »
Une allusion doit évoquer avec suffisamment d’indices les personnes ou les choses auxquelles elle renvoie. On en est loin dans sa prose. Je ne parviens à comprendre comment on peut dire qu’Anderson pensait ici au Mot de maçon. Il parle des païens qui ont pu cultiver l’Art royal, mais sans atteindre la perfection du peuple à part (peculiar), en l’occurrence le peuple hébreu. En citant le temple de Salomon il met en valeur non pas les colonnes mais le propitiatoire (mercy seat).
Quel est alors le rapport entre ce passage est un dictionnaire qui date de 1899 (pas de 1698 !) Aucun, d’autant que ce dictionnaire donne la définition suivante. »
Masons-Word, who ever has it, shall never want, there being a Bank at a certain Lodge in Scotland for their Relief. T’is communicated with a strict Oath, and much Ceremony, (too tedious to insert) and if it be lent to any of the Society, he must, (nay will) come immediately, tho’ very Busy, or at great Distance. » Rien sur Jachin et Boaz, rien sur une griffe. Au contraire, on devine ici un rappel de ce que dit Robert Plot qui présente dans son Histoire naturelle du Staffordshire le cas d’un maçon qui doit aider un autre qui lui fait appel, même s’il doit pour cela descendre d’un clocher.
On est peut être d’accord sur le fait qu’on trouve mention du Mot de Maçon dans un manuscrit de 1699. Il faut cependant être téméraire pour greffer ou cristalliser un rite autour. En outre, que faire du Mot de maçon que le comte de Mar possède en 1714,comme en atteste de manière irrécusable une lettre qui lui est adressée, lequel comte est éminent jacobite, si éminent qu’il prendra la tête de la rébellion de 1715, groupant autour de lui de nombreux francs-maçons ? Politique ou religion ?
Erreur de frappe dans mon post quant à la date de première publication du dictionnaire : 1698 (pas 1899)
(12) mason word se traduit par le(s) mot (s) du maçon c’est a dire le rituel pris dans son ensemble
(43) mason word signifie aussi promesse ou encore engagement. Chercher au delà du sens d’aujourd’hui.
Bonjour
Salut à tous,
Je suis l’auteur de cette recension critique.
Je ne pense pas avoir été discourtois, je pointe une forclusion qui n’est pas spécifique à l’auteur du livre
La question du lien des fondateurs du REAA avec la traite mériterait d’être prise en compte
par les historiens.
Si on veut bien me relire, je distingue plusieurs aspects intéressants dans le livre.
Quant à la volonté d’ancrer le plus loin possible une tradition, ce dont témoigne, entre autres
l’échange entre André et Patrick, je voudrais en dire deux choses:
Il existe des deux côtés un gros travail qui mérite respect, mais aussi un aspect pathétique dans ce travail de préhistoire. C’est à celui qui remontera le plus haut pour ancrer l’écossisme dans une haute antiquité.
Le titre, « les sources secrètes », j’aurais du insister là dessus, mais que n’aurait-on pas dit? tend à installer une dimension ésotérique à l’histoire, ce qui pose à mon humble et criticable avis un biais épistémologique.
Remonter le plus haut n’est pas un but en soi mais le seul moyen d’identifier l’identité historique exacte des vrais fondateurs du rite, et en l’occurrence remonter à une cause politique (les Stuart) n’est pas remonter à une cause religieuse confessionnelle (le calvinisme presbytérien des milieux écossais qui ont vu apparaître le Mot de maçon).
Je confirme pour avoir conversé avec M. Kervella et avoir lu ses ouvrages, notamment la biographie très fouillée consacrée à Ramsay : son honnêteté intellectuelle, son sérieux mais également son amabilité et sa courtoisie sont ses qualités principales.
Mon cher Joël je ne puis qu’abonder dans ton sens, j’ai fais le même parcours que toi avec les livres d’André Kervella (de plus ma famille est originaire de Plougastel donc je connais la force des Bretons) je ne mets pas en cause la sincérité d’André qui serais pour le faire, ni sa culture et l’exactitude de ses propos, néanmoins la franc-maçonnerie m’a appris aussi la maîtrise et la bienveillance.
Fraternellement
JF
Merci d’abord de cette réponse qui éclaire, mais à mon sens ne justifie que partiellement le ton employé, quand le fonds est juste il s’impose de lui-même ce qui est le cas je n’en doute pas, j’ai d’ailleurs constaté et reconnu le travail de fonds. Néanmoins je persiste a penser que le coup pour coup n’est pas la bonne méthode, c’est sans doute après plus de trente ans de vie maçonnique et après avoir malheureusement vécu quelques affrontements qui ne devraient appartenir qu’au monde profane et qui ternissent notre institution que j’en suis arrivé à la conclusion maçonnique qui m’ a été enseignée dès que j’ai reçu la lumière après avoir quitté le monde des apparences, que je suis prêt a pardonner à ceux qui étaient considérés comme mes ennemis auparavant et cela est un apaisement, la critique qui remet les choses en place est utile, l’exposé des faits permet au lecteur, au maçon de se faire un jugement par Lui-même. Je ne suis, ni le soutien, ni l’avocat d’une partie, mais ce retour est simplement celui que j’ai entendu des quelques frères à qui j’ai conseillé la lecture de votre livre, j’en ai d’ailleurs acheté 9 pour eux et 1 pour mois, cela démontre mon intérêt.
Je réitère que ce qui est pour moi, je dis bien pour moi un manque de bienveillance ne saurait ternir l’ensemble de l’ouvrage. Je n’oublie pas que c’est avec les lumières du passé que l’on éclaire l’obscurité de l’avenir, et que ces lumières doivent êtres pures.
Bien Fraternellement
JF
Belle réponse, nuancée. Cela dit, la FM ne doit pas être l’école de l’hypocrisie. Sur le plan sémantique, un rapport est à établir entre les mots « bienveillance » et « hypocrisie », les deux étant apparemment parfois confondus.
Et une plume au chapeau de Kervella (qui n’en demande pas) : lui au moins se donne la peine de répondre à toutes les questions qui lui sont posées. Ce qui est loin d’être le cas sous d’autres contrées aussi pluvieuses que l’Armor…
Répondre à toutes les questions, sauf la mienne, mais bon sur ces sujets, j’ai l’habitude.
Tu comprendras que ce genre de question ne se résout pas sur un forum, fût-il maçonnique. Ta critique nuancée (qui montre que tu as lu l’ouvrage, ce qui n’est pas toujours le cas !) encouragera sans doute d’autres chercheurs à creuser le sujet.
Ma phrase est ambiguë : « ce qui n’est pas toujours le cas d’autres critiques que toi ».
Bonjour !
Excellent article sur le livre de André Kervella que j’ai pu apprécié par la lecture de ses précédents ouvrages. La qualité de ses recherches, les précisions qu’il apporte, ses points de vue et ses théories ne peuvent êtres mises en cause. La lecture s’avère néanmoins difficile il faut être motivé !
Néanmoins un regret de taille sa manière de contester et critiquer ses confrères, ses frères la remise en cause parfois brutale de leurs théories. Interroge sur son engagement, sans tomber dans la banalité je m’enrichis de vos différences qui en matière historique peut paraître inadaptée, ses attaques sans tomber dans l’hypocrisie parfaitement anti-maçonnique auraient pu êtres plus fraternelles. C’est sans doute de ma part un excès de sentimentalité que j’assume parfaitement, le qui suis-je pour juger mes frères ! n’étant pas historien mais reconnu comme tel par mes frères.
Un peu de courtoisie cette vertu chevaleresque propre aussi au R E A A aurait été la bienvenue.
JF.
Je ne peux qu’être d’accord sur le regret exprimé et sur l’aspiration à la courtoisie. Il convient cependant de préciser que je ne fais jamais que répondre à ceux qui usent du même procédé à mon égard. Je réponds… Vous connaissez la boutade « Messieurs les Anglais, tirez les premiers. » Après, j’ajuste la réplique à la hauteur de la critique reçue, sauf quand elle est légitime, auquel cas j’en prends note, je corrige et remercie.
Ma manière de procéder est simple. Quand la critique me paraît illégitime, car non argumentée ou spécieuse, je lis attentivement mon contradicteur pour savoir s’il ne tombe pas lui-même dans l’erreur à laquelle il croit pour sa part échapper. Nul n’est infaillible, et certes pas moi. Mais rappeler à la cohérence ceux qui prennent de haut leurs confrères, parce qu’ils sont aveugles ou myopes sur leurs propres contradictions ou approximations, fait partie du jeu dont ils amorcent donc le commencement.
Je distingue la recherche de la compilation. Par bonheur, il existe des archives qui permettent de prouver des analyses, de justifier une reconstruction des évènements. Ce qui m’interroge souvent quand je lis les ouvrages des compilateurs, c’est leur hâte à conclure sans avoir jamais manié un document. Ils se contentent de lire des prédécesseurs en les accommodant à la sauce de l’éclectisme, ou en se laissant guider par des impressions forgées à l’enclume des préjugés.
Un exemple pour illustrer mon propos. Cherchez dans le paysage maçonnique français les auteurs qui ont étudié les archives des Stuart conservées à Windsor et qui, à partir d’elles, se sont efforcés de répondre aux questions laissées sans réponse dans les ouvrages publiés sur les origines de la franc-maçonnerie. On peut ne pas en avoir le temps, ni l’envie. Cela s’admet. Mais, alors, les débats sont automatiquement faussés selon le fameux principe de la méconnaissance de cause. C’est bien ce qui me gêne.
André Kervella écrit des auteurs qu’il critique : « C’est leur hâte à conclure ». J’ai lu 3 ouvrages de Kervella qui traitent de la période que j’ai étudiée (1356-1751). J’ai eu le regret d’y constater que A. K. a agi « à la hâte » en n’analysant pas objectivement et impartialement les nombreux documents rassemblés par Harry Carr sur le « Mason word », documentation ancienne mais complétée jusqu’à aujourd’hui par la mise à jour de quelques documents ignorés par Carr. Et c’est parce que A. K. ne s’était pas donné comme tâche de consacrer une étude spéciale au Mason word (qui date d’au moins 1628) et à son origine confessionnelle qu’il a mis l’emphase sur les Stuart au point de « conclure à la hâte » en les présentant comme les inventeurs, au moment des « guerres civiles » (1642-1651), de la maçonnerie dite plus tard « moderne ». Ce qui ne fut pas le cas.