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Pierre-Théodore Verhaegen (1796-1862), avocat et leader du parti libéral, fut député et président de la Chambre (de 1848 à 1852 et de 1857 à 1859). Il est un des fondateurs de l’Université Libre de Bruxelles qu’il plaça sous le signe du Libre Examen.
Initié en 1818 à la Loge bruxelloise l’Espérance par le prince Guillaume d’Orange, héritier du trône du royaume uni des Pays-Bas, il en démissionna en 1823. Il reprit une activité maçonnique en 1832 (donc après l’indépendance belge) en s’affiliant aux Amis Philanthropes dont il allait être 24 fois Vénérable ; de 1854 à sa mort, il fut Premier Grand Surveillant et Grand Maître ad interim du Grand Orient de Belgique. Pendant la Grande Maîtrise de Stassart, de 1835 à 1841, il avait déjà occupé la fonction de Premier Grand Surveillant, étant entendu que, vu les multiples occupations de Stassart, ce serait Verhaegen qui ferait tout le travail.
Il avait rêvé de faire du Grand Orient la machine de guerre du parti libéral. C’est d’ailleurs sous son impulsion que, en 1854, le Grand Orient eut la malencontreuse idée d’abroger l’article 135 de ses Statuts et règlements généraux qui proscrivait les discussions politiques et religieuses en loge, ouvrant ainsi la porte à une période de conflits et de déchirements qui décimèrent les colonnes, jusqu’à ce qu’en 1866 l’Obédience déclare que dans nos loges, les Frères échangent leurs idées sur tout ce qui touche à la vie morale, comme à la vie civile des hommes, mais les ateliers ne prennent, et d’ailleurs ne peuvent pas prendre, de résolution sur ces matières. L’apaisement qui s’ensuivit permit, au cours de la décennie suivante, le rétablissement de relations avec des Obédiences étrangères.
Il était toujours resté proche de Guillaume d’Orange (qui devint Guillaume II des PB en 1840) et il contribua au rapprochement ultérieur des deux obédiences (ce qui fut rappelé lors de la tenue funèbre organisée après son décès)
Catholique par tradition et par choix personnel, il fut toute sa vie anticlérical et se situa plutôt à l’aile droite de son parti, s’opposant, par exemple, à l’enseignement obligatoire.
A l’attention de Chicon
En B, coexistent depuis toujours, mais surtout depuis la 2° guerre mondiale, deux systèmes d’enseignement, l’un dit libre (c’est à dire essentiellement catholique, plutôt majoritaire) et l’autre « officiel » (dépendant de l’Etat, des provinces ou des communes). Le problème se posait du financement de ces deux réseaux (dans un pays où les frais de culte sont à charge de l’état), mais aussi de la liberté des pouvoirs organisateurs (tant publics que libres) s’agissant des méthodes pédagogiques et des principes dits « philosophiques ». Les partis catholiques (le parti social-chrétien) et les partis « laïques » (le parti socialiste et le parti libéral) s’opposèrent farouchement sur la question pendant de nombreuses années.
Le Pacte Scolaire de 1959 tenta, avec succès semble-t-il, de résoudre le différend entre les opposants. Les deux réseaux sont également subventionnés (subsidiés, on dit en belge) par l’état mais gardent leur liberté relative (les programmes sont les mêmes, les horaires aussi d’ailleurs, mais l’enseignement de la religion ou de la morale est laissé au choix des parents dans le réseau officiel).
Voilà pour la théorie. Dans les faits, jusqu’il y a peu, la proximité d’un de ces « réseaux » jouait un rôle essentiel dans l’admission d’un candidat en franc-maçonnerie. Avoir suivi l’enseignement catholique, s’être marié à l’église, mettre son enfant dans le réseau « libre » … étaient raisons suffisantes pour fermer définitivement la porte des loges belges (classiques) à tout candidat égaré. Qu’en est-il aujourd’hui ? Je n’oserais répondre.
Si en France on subventionnait également tous les enseignements, plus le principal culte; le GO irait « à la manœuvre ». Notre défiance de « la calotte » héritée de 1789 est une réalité.
Il y avait tellement d’élèves et d’étudiants français en Belgique,et de toute région, que l’Etat belge a décidé de ne plus « subsidier le minerval » pour les français, il y a longtemps. Grosse inquiétude chez les français mais l’idée fut abandonnée.
Il est regrettable que la plupart des lecteurs d’Hiram ne pourront profiter de l’article passionnant de Jeffrey Tyssens (De kieren van de tempelpoort. Negentiende-eeuwse vrijmetselaarsloges tussen geheim, divulgatie en angst (Les fissures de la porte du temple. Les Loges maçonniques du XIXe siècle entre secret, divulgation et peur).
Les affrontements entre l’Eglise catholique et la franc-maçonnerie belge furent particulièrement vifs sur la question des funérailles. L’Eglise refusait les rites funéraires et l’accompagnement en terre consacrée aux maçons décédés qui le souhaitaient, s’ils n’abjuraient leur engagement pre mortem.
Tyssens cite l’exemple de Pierre-Théodore Verhaegen, Grand Maître (faisant fonction) du GOB, un des fondateur de l’Université Libre de Bruxelles, décédé en 1862, et celui de Hippolyte Metdepenningen, VM pendant près de 30 ans de la loge Le Septentrion à Gand jusqu’à son décès en 1881 (tant qu’il vécut, elle resta orangiste, fidèle au Grand Orient des Pays-Bas). Aucun des deux ne souhaitait de funérailles religieuses mais leur situation sociale et leur participation active au parti Libéral, adversaire politique du parti catholique donna à ces événements une publicité non négligeable.
Le conflit était encore bien vivant dans les années cinquante du siècle passé où l’opposition entre les deux mouvements de pensée était une composante normale de la société, séparant la bourgeoisie bruxelloise ou provinciale en deux blocs distincts. Il finit par s’éteindre (certains diront certainement qu’il n’a pas disparu) avec la résolution de la « question scolaire » en 1959 et, surtout, la perte d’influence de l’Eglise catholique dont les effectifs, sinon les moyens, n’ont cessé de de diminuer.
Merci à notre historien polyglotte qui nous a éclairé sur le côté belge cette querelle bien connue également chez nous. Apparemment il n’y a pas eu de « séparation de l’Eglise et de l’Etat » chez nos voisins, mais qu’est ce que la résolution de la « question scolaire » de 1959 ?
Il est intéressant de noter que Théodore Verhaegen était, par ailleurs, catholique.
Dommage que je ne parle ni flamand, ni hollandais. Un frère de Toulouse ou Lyon pourrait il nous aider…
Un camarguais ne ferait-il pas mieux l’affaire?
Un excellent article, en français celui-là, du même auteur sur le même sujet est disponible ici:
https://revistas.ucr.ac.cr/index.php/rehmlac/article/view/6591/6282
Voir aussi, en anglais cette fois :
https://revistas.ucr.ac.cr/index.php/rehmlac/article/view/24279/24850
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